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En mars 1894, le Nouveau Cirque présenta à nouveau une pantomime construite autour d'une vedette de café-concert, cette fois le très populaire chanteur londonien Harry Fragson (1869-1913). C'était ''L'agence Bidard'', qui était prétexte à une imaginaire audition de talents, dont les candidats étaient soit de jolies filles, soit des clowns, avec Chocolat, vêtu d'une robe brodée de fausses perles et de diamants, dans une imitation irrésistible de Caroline Otéro—dite « La Belle Oréro » (1868-1965), célèbre danseuse, actrice occasionnelle, et courtisane attitrée des têtes couronnées. Bien sûr, Fragson était le dernier à « auditionner » et obtenait son succès habituel. C'était une authentique pantomime, mais c'est surtout Fragson qui attira son large public.
 
En mars 1894, le Nouveau Cirque présenta à nouveau une pantomime construite autour d'une vedette de café-concert, cette fois le très populaire chanteur londonien Harry Fragson (1869-1913). C'était ''L'agence Bidard'', qui était prétexte à une imaginaire audition de talents, dont les candidats étaient soit de jolies filles, soit des clowns, avec Chocolat, vêtu d'une robe brodée de fausses perles et de diamants, dans une imitation irrésistible de Caroline Otéro—dite « La Belle Oréro » (1868-1965), célèbre danseuse, actrice occasionnelle, et courtisane attitrée des têtes couronnées. Bien sûr, Fragson était le dernier à « auditionner » et obtenait son succès habituel. C'était une authentique pantomime, mais c'est surtout Fragson qui attira son large public.
 
   
 
   
  "Le Moulin du gué", la « folie nautique » qui suivit, était une autre version étirée de la classique entrée du « service militaire. » A la fin de la pièce, des soldats récalcitrants tentaient de s'enfuir et étaient pourchassés par leur sergent et ses hommes ; finalement, alors qu'ils essayaient de traverser une rivière sur un gué glissant, ils tombaient tous à l'eau… Ce ne fut probablement pas la meilleure des pantomimes du Nouveau Cirque, mais elle bénéficia de la visite du prince de Galles (bientôt Edward VII), qui aurait certainement préféré voir Chocolat dans sa parodie d'Otéro : elle était, disait-on, une de ses « connaissances » ! La saison s’acheva sur la reprise d'un classique au succès inusable, ''La Noce de Chocolat''.  
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  "Le Moulin du gué", la « folie nautique » qui suivit, était une autre version étirée de la classique entrée du « service militaire. » A la fin de la pièce, des soldats récalcitrants tentaient de s'enfuir et étaient pourchassés par leur sergent et ses hommes ; finalement, alors qu'ils essayaient de traverser une rivière sur un gué glissant, ils tombaient tous à l'eau… Ce ne fut probablement pas la meilleure des pantomimes du Nouveau Cirque, mais elle bénéficia de la visite du prince de Galles (bientôt Edward VII), qui aurait certainement préféré voir Chocolat dans sa parodie d'Otéro : elle était, disait-on, une de ses « connaissances » ! La saison s’acheva sur la reprise d'un classique au succès inusable, ''La Noce de Chocolat''.
  
 
===Changement de décor===
 
===Changement de décor===

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Par Dominique Jando

Nouveau Cirque Cheret.jpg

Les Arènes Nautiques

Situé de 1886 à 1926 rue Saint Honoré à Paris, artère commerçante élégante à deux pas de la place Vendôme, le Nouveau Cirque fut en son temps le cirque le plus élégant et le plus innovant de la capitale française—et même d'Europe. Pendant de nombreuses années, ce fut le cirque de prédilection de la haute société. Sa taille relativement petite lui conférait chaleur et intimité (on l'appela parfois une « bonbonnière »), mais avec le temps, cette petite taille et sa capacité limitée le rendirent difficile à gérer. Il commença à perdre de son attrait avant la Première Guerre mondiale, et se révéla incapable ensuite de s’adapter à l’après-guerre.

Le Nouveau Cirque fut construit pour son époque, ce qu'on appelle aujourd'hui la « Belle Époque » parisienne, dont il fut l'un des joyaux. Après la Première Guerre mondiale, Paris entra dans une nouvelle ère, ce qu'on appellera le jazz age. Puis, au début des années 1920, le vénérable Cirque d'Hiver, entièrement rénové, revint à la présentation de spectacles de cirque après une interruption plutôt futile en tant que cinéma et théâtre ; le Cirque Medrano entra dans une de ses périodes les plus lucratives ; et le tout nouveau Empire Music-Hall Cirque ouvrit ses portes Avenue de Wagram : la petite « bonbonnière » qu'était le Nouveau Cirque apparut soudain comme le vestige d'une autre époque. Il dut faire face à une compétition pour laquelle il n’était pas équipé. Autrefois cirque révolutionnaire et avant-gardiste dont la vie riche et souvent glorieuse avait duré quarante ans, il fut finalement contraint à fermer ses portes.

Joseph Oller

Joseph Oller etd Henri de Toulouse Lautrec aux courses (c.1900)
Le Nouveau Cirque fut créé par Joseph Oller (1839-1922), un entrepreneur imaginatif et un prolifique organisateur de divertissements parisiens. Il était né Josep Oller i Roca à Terrassa, en Catalogne espagnole, le 10 février 1839 ; ses parents étaient Francesc Oller, négociant en drap, et son épouse, Teresa, née Roca. Josep avait deux ans lorsque la famille émigra en France et s'installa à Paris où Josep, devenu Joseph, grandit. Il retournera plus tard en Espagne pour étudier à l'Université de Bilbao, au Pays-Basque, où il découvrit les combats de coqs, encore très populaires au XIXe siècle. Sa passion pour ce jeu sanglant l’amena à devenir bookmaker—sa première aventure entrepreneuriale.

De retour à Paris, Oller transféra ses activités de bookmaker aux courses hippiques. La France avait alors gagné un nouvel empereur, Napoléon III, dont le demi-frère, le Duc de Morny, avait joué un rôle déterminant dans le développement des courses hippiques en France et avait construit l'hippodrome de Deauville-La Touques en 1862. Morny mourut en 1865, mais avec son aide, Oller avait commencé à développer le concept du « pari mutuel, » un système original dans lequel les paris étaient placés dans un fonds commun et les gagnants se partagaient les enjeux des perdants—après que le bookmaker eut pris sa commission. Oller mit son nouveau système en œuvre en 1867 ; il remplaçait avantageusement les paris à cotes fixes et fit de lui un homme riche. Oller lança également Le Bulletin des Courses, le premier journal hippique français.

Puis, le 16 juillet 1870, la France déclara la guerre à la Prusse ; Oller, alors âgé de trente et un ans, s'expatria à Londres pour éviter le conflit. C'est là qu'il commença à s'intéresser au monde du spectacle, moins au théâtre qu'au populaire music hall anglais, alors en plein essor. Entretemps, en septembre, la France subit une humiliante défaite à Sedan après seulement un mois et demi de combats, qui entraîna la chute du Second Empire. Une nouvelle République fut immédiatement instituée et un traité de paix fut signé en janvier 1871. La Commune de Paris, tentative éphémère mais violente de révolution socialiste, suivit.

Affiche pour La Grande Piscine Rochechouart (1886)
Une fois le calme revenu, Oller rentra à Paris et reprit ses activités de bookmaker. Malheureusement, en 1875, le Pari Mutuel fut jugé illégal et Oller fut condamné à une amende et à quinze jours de prison. Mais cela ne le découragea pas ; en 1878, il créa l'élégant hippodrome de Maisons-Laffitte, en banlieue parisienne, suivi de l'hippodrome de Saint-Germain en 1882. En 1891, la création du Pari Mutuel Urbain (le PMU), une version officielle de son système de paris sur les courses hippiques gérée par le gouvernement français, prouva en fin de compte qu'il avait vu juste ! Entretemps, il avait mis à profit son nouvel intérêt pour le spectacle.

Le vaste agence du bookmaker Oller était située boulevard des Italiens, dans un quartier à la mode qui était au centre de la vie théâtrale parisienne, et dans ce qui avait été auparavant un théâtre de variétés, Les Folies Parisiennes ; en 1875, après avoir purgé sa peine de prison et pour ne pas laisser son espace inutilisé, il le transforma de nouveau en théâtre de variétés, Les Folies Oller (qui deviendront un théâtre à part entière trois ans plus tard). Même si Oller maintenait toujours des activités liées aux courses hippiques, il ne manquait pas d'idées nouvelles : en 1885, il ouvrit La Grande Piscine Rochechouart, la première piscine couverte de Paris, qui fit immédiatement sensation. Sous le Second Empire, les Parisiens fortunés avaient découvert les plaisirs des bains de mer (à Deauville notamment) et la populaire Piscine Rochechouart les attira en masse. Cependant, elle devint rapidement un peu trop démocratique pour beaucoup d’entre eux.

Pour satisfaire sa clientèle fortunée, Joseph Oller imagina une solution très originale : un espace polyvalent qui serait une piscine pendant les mois d'été, puis un cirque le reste de l'année. Ou du moins, c’est l’histoire telle qu’elle est racontée habituellement ; on peut cependant se demander si Oller a développé cette idée singulière avant ou après avoir trouvé l'espace idéal sur l'élégante rue Saint-Honoré : compte tenu de l'aménagement singulier du lieu qu'il découvrit, on peut supposer que l'idée de construire un cirque à usage polyvalent lui fut inspirée par le lieu même—à moins qu'il n'ait eu la chance inouïe de trouver un endroit qui semblait conçu pour y installer un cirque ; après tout, son idée initiale était tout simplement de construire une piscine.

Le Panorama de Reischoffen

Le Panorama de Reischoffen, élévation (1881)
L'espace, situé au 251 rue Saint-Honoré, avait été construit pour abriter le « Panorama de Reischoffen » et avait ouvert ses portes en novembre 1881. Très populaires au XIXe siècle, les panoramas étaient de grandes scènes réalistes peintes à 360º sur un gigantesque cyclorama, auquel été ajoutés des objets et des personnages tridimensionnels. Ces panoramas évoquaient généralement un lieu célèbre ou, le plus souvent, une bataille historique. Le panorama exposé rue Saint-Honoré, intitulé La Charge des Cuirassés de Reischoffen, représentait un des rares glorieux épisodes de la courte guerre franco-prussienne de 1870. Il flattait la fibre patriotique des Français, pour qui la défaite de Sedan (et la perte de l'Alsace, où se trouve Reischoffen) restait une blessure ouverte.

La grande rotonde dans laquelle était installé le panorama avait été érigée derrière ce qui était autrefois l'élégante salle Valentino, illustre salle de bal du Second Empire qui avait depuis longtemps perdu de son éclat et avait connu plusieurs transformations, toutes infructueuses. L'ensemble qui l'avait finalement remplacée avait été conçu par Charles Garnier (1825-1898), l'architecte des flamboyants opéras de Paris et de Monte-Carlo. (Garnier construira un autre panorama en 1883, le Panorama Marigny, aujourd'hui Théâtre Marigny, dans les Jardins des Champs-Élysées.)

Affiche pour le Panorama de Reischoffen (1881)
La rotonde de Garnier avait un diamètre de 33 mètres et sa coupole culminait à 27 mètres sous la lanterne. Le mur périphérique avait une hauteur de 18 mètres. Elle n'avait pas de fenêtres, mais la coupole était dotée d'un ruban continu de lucarnes sur son pourtour qui éclairaient le panorama. Pour accéder à la rotonde, Garnier avait aménagé dans l'espace de l'ancienne salle de bal un foyer spectaculaire doté d'un grand escalier, dans le style néo-baroque qui l'avait rendu célèbre. L'ensemble était complété par une façade étroite mais élégante sur la rue Saint-Honoré.

Malgré ses aménagements somptueux, le Panorama de Reischoffen fut démonté en 1882 pour être emmené en tournée dans les provinces françaises, où il fut exposé dans des constructions en bois spécialement érigées pour l'occasion. Sans autre panorama pour le remplacer, la rotonde parisienne était devenue pratiquement inutile, mais l'élégant foyer de Garnier fut utilisé pour divers événements, de salons d'art à des réunions politiques. Le Panorama Valentino, comme on l'appelait désormais, était devenu un espace à louer—ou, éventuellement, à vendre.

Tels qu'ils étaient, la rotonde de l'ancien panorama et son hall d'entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. formaient un espace idéal qui semblait avoir été conçu pour abriter un cirque : toutes les infrastructures de base étaient déjà là ! Le cirque avait toujours été très populaire à Paris et la capitale française, avec ses quatre cirque stables (le Cirque des Champs-Élysées, le Cirque d'Hiver, le Cirque Fernando et l'Hippodrome de l'Alma), était l'épicentre du cirque européen. Pas étonnant donc que l'entrepreneur Joseph Oller ait décidé d'associer, dans cet espace étonnamment idéal de la rue Saint-Honoré, un cirque à sa piscine !

Un cirque révolutionnaire

Le pâté de maisons sur lequel Oller devait installer ses Arènes Nautiques (comme s'appelait à l'origine le Nouveau Cirque, à l'instigation du célèbre dramaturge Victorien Sardou) semblait avoir été prédestiné à un tel projet : de 1807 à 1816, il avait abrité le deuxième Cirque Olympique des Franconi, qui était situé de l'autre côté de l'ensemble, rue du Mont-Thabor. Oller, qui n'avait évidemment jamais connu ce cirque oublié depuis longtemps, n'avait aucune raison apparente d'avoir choisi son emplacement en raison du chapitre de l'histoire du cirque qui s'était écrit dans ce quartier, comme on l'a parfois suggéré. Ce ne fut qu'une heureuse coïncidence : son choix avait en effet été dicté par des raisons plus prosaïques.

Le Nouveau Cirque, élévation (1886)
L'ancien panorama était doté d'une façade élégante, d'un hall d'entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. majestueux et d'un foyer spectaculaire qui ne nécessitaient aucune modification majeure. La grande rotonde qui allait accueillir le cirque lui-même et sa piscine était une autre affaire : ce n'était pour l'instant qu'une immense coquille vide qu'il fallait entièrement aménager, et dont il fallait aussi creuser le sol pour y installer un bassin d'eau. Il fallait également construire des annexes pour accueillir des écuries, des loges et, comme nous le verrons, une importante machinerie. Oller confia le projet à Gustave-André Gridaine (1836-1903), l'architecte du Cirque Fernando, et à Aimé Sauffroy (1840-1907), architecte pré-Art Nouveau passionné de structures métalliques, qui avait conçu le très novateur siège du journal Le Figaro, rue Drouot, en 1874.

Pour permettre la polyvalence de la rotonde comme cirque aussi bien que comme piscine, Gridaine et Sauffroy travaillèrent avec Louis Solignac (1858-1902), l'ingénieur qui avait conçu les éléments techniques de la Piscine Rochechouart. Ensemble, ils imaginèrent un projet tout-à-fait original : les six rangées de sièges entourant directement la piste furent installées sur une structure métallique construite au-dessus du bassin d'eau. Les sièges et la structure qui les supportait pouvaient être retirés en été pour révéler la totalité de la piscine, qui avait un diamètre de 25 mètres avec une profondeur de trois mètres.

Plan du Nouveau Cirque (1886)
Lorsque cette structure amovible était remise en place, ses sièges entouraient une piste de cirque qui avait le diamètre traditionnel de 13,5 mètres, avec un plancher en lattes de bois muni d'interstices qui reposait sur une autre structure métallique, soutenue en son centre par une colonne hydraulique qui permettait d'abaisser la piste sous le niveau de l'eau ; pendant l'opération (qui durait environ six minutes), l'eau s'engouffrait par les ouvertures du plancher. Cet ingénieux système fut conçu par Léon Edoux (1827-1910), l'ingénieur et industriel qui avait développé les premiers ascenseurs français, dont il équipera plus tard la Tour Eiffel entre ses deuxième et troisième étages. (Installés en 1889, les ascenseurs originaux d'Edoux sur la Tour restèrent en service jusqu'en 1983 !).

Outre son utilisation pour abaisser le sol de la piste lors de la mise en service de la piscine, le système d'Edoux permettait également de transformer rapidement la piste de cirque en un bassin d'eau de même diamètre lorsque le bâtiment était utilisé comme cirque, permettant ainsi la présentation de spectacles nautiques, qui seront l'attraction(Russian) A circus act that can occupy up to the entire second half of a circus performance. la plus populaire du Nouveau Cirque. Ce concept révolutionnaire présentait cependant un problème : les pistes de cirque étaient traditionnellement recouvertes de terre et de sciure de bois pour permettre les présentations équestres, qui constituaient encore la partie essentielle du spectacle. Les architectes trouvèrent une solution originale : ils recouvrirent le plancher de la piste d'un épais tapis amovible en fibres de sparte tissées. Le tapis pesait à lui seul deux tonnes ; le poids total du plancher, une fois recouvert, atteignait trente tonnes, mais le système d'Edoux était construit pour soutenir une telle charge.

Le bassin d'eau (1886)
Tout cela était certes à la pointe de la technologie de l'époque, mais ce n'était pas là l'étendue des innovations du Nouveau Cirque. L'ensemble du bâtiment fut équipé de l'éclairage électrique, ce qui était encore une rareté à l'époque : l'électrification de Paris venait de commencer en 1882, et les premiers tronçons de son réseau électrique n'apparaîtront qu'en 1888. Solignac dut installer deux puissants générateurs—qui généraient non seulement l'électricité nécessaire, mais aussi les plaintes des voisins du cirque… (Cependant, le bâtiment était quand-même équipé d'un éclairage au gaz en cas de panne de courant : apparemment, l'alimentation électrique n'était pas jugée entièrement fiable.) Solignac conçut également un système pour maintenir la température de l'eau du bassin à 25°, et le cirque et ses annexes furent équipés d'un chauffage à air chaud.

Quant à la salle, sa piste était entourée de six rangées de fauteuils individuels à sièges rabattables, nouveauté que venait d'introduire le Théâtre du Vaudeville, boulevard des Capucines. Derrière eux se trouvait un cercle de cinquante-six loges de théâtre confortables, pouvant accueillir chacune cinq personnes. Au-dessus des loges se trouvait un vaste promenoir, avec une série de bars disséminées sur sa périphérie. Cela donnait un total de seulement 870 places assises, le reste des spectateurs se tenant debout dans le promenoir. Le cirque était pourtant annoncé comme pouvant accueillir 3.000 spectateurs, ce qui aurait impliqué une foule très improbable de plus de 2.000 personnes debout dans le promenoir ! L'insuffisance de places assises finira par se révéler un handicap financier et, plus tard, tout le pourtour du promenoir sera équipé de deux rangées de sièges supplémentaires.

L'enlèvement du tapis de piste (1886)
La salle fut décorée dans un style néo-baroque en harmonie avec le foyer de Garnier, avec des ornements dorés signés Etienne Cornellier (1837-1902), des décors floraux du grand spécialiste du genre, Eugène Petit (1839-1886), et onze fresques représentant des scènes du cirque romain par Jules-Élie Delaunay (1828-1891), artiste respecté dont des panneaux peints sont toujours visibles dans le Salon octogonal de l'Opéra de Paris. L'orchestre était perché sur un balcon au-dessus du promenoir, surplombant l'entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. de piste. L'ensemble donnait une impression de chaleur et de luxe, et la petite taille de la salle (trente-trois mètres de diamètre, contre les quarante-deux mètres du Cirque d'Hiver) ajoutait une sensation d'intimité.

Une importante annexe fut construite à la place d'un petit bâtiment dans la cour adjacente à la rotonde, agrandissant ainsi l'extension originale de l'ancien Panorama. Elle comprenait des écuries pour vingt chevaux, des espaces pour les générateurs électriques et autres machineries et, à l'étage, des bureaux et des loges. L'ancienne cour que l'annexe occupait était reliée à la rue Saint-Honoré par une allée qui débouchait sur la rue, à quelques mètres de la façade du cirque. Cette allée permettait désormais d'accéder aux écuries, à l'entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. des artistes, et à une entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. latérale de la salle.

Le Nouveau Cirque ouvre ses portes

Affioche représentant Léopold Loyal (1886)
Le Nouveau Cirque (l'enseigne qu'Oller avait choisie pour le cirque lorsqu'il n'était pas utilisé comme piscine—et le seul nom sous lequel il sera connu par la suite) ouvrit ses portes le vendredi 12 février 1886. Le Tout-Paris des arts et le monde des courses étaient présents. Le Régisseur général (poste qui, dans les cirques parisiens, était un mélange de directeur artistique et du personnel, metteur-en-scène et maître de manège) était Léopold Loyal (1835-1889), issu de la prolifique dynastie de cirque qui a fourni tant de nombreux régisseurs aux cirques parisiens qu'un Monsieur Loyal(French) The régisseur or presenter of the show in a French circus. So called because of the many members of the Loyal family who occupied this position brilliantly in Parisian circuses. est aujourd'hui le terme français qui désigne un présentateur ou maître de manège.

Maître de manège et directeur de cirque très populaire qui avait déjà exercé les fonctions de régisseur(French) The stage (or ring) manager—and sometimes Ringmaster—in a French circus. (See also: Monsieur Loyal) dans les cirques parisiens de Louis Dejean, Léopold Loyal était « grand, large, ventripotent même comme un maître d'hôtel, mais décoratif au suprême degré, et il tenait son fouet comme un empereur romain son sceptre »—selon Georges Strehly dans son livre L'Acrobatie et les Acrobates (1903). Loyal amena avec lui ses frères, ses fils et une importante liste d'artistes que, lors de la soirée d'ouverture, les critiques de cirque jugèrent sans grand intérêt—mais le célèbre clown Billy Hayden sauva la soirée avec son humour verbal à l'accent anglais et son cochon dressé.

Car tout ne se passa très bien lors de cette première soirée : les chevaux, peu habitués à travailler sur un tapis en sparte, se montrèrent particulièrement indisciplinés, mais le public, féru de chevaux, l'accepta sans trop de difficulté : çà n'eut aucune importance en comparaison du spectacle fantastique qu'offrit le retrait du tapis de piste et la vision extraordinaire de la piste se transformant en bassin d'eau dans lequel des naïades légèrement vêtues vinrent évoluer gracieusement ! Dans son compte-rendu de la soirée, le très influent Journal des Débats ne dissimula pas son enthousiasme, qualifiant le Nouveau Cirque de « huitième merveille du monde. » Les riches clients d'Oller furent également impressionnés par la magnificence et le confort du Nouveau Cirque, et bientôt toutes les loges furent vendues pour la saison. Le Nouveau Cirque était là pour rester.

George Foottit (c.1890)
Sa troupe d'artistes se renforça rapidement, notamment avec l'arrivée d'un jeune clown anglais, George Foottit, dont la parodie d'une ballerine à cheval connut un énorme succès. Foottit deviendra rapidement la star du Nouveau Cirque. Le bassin d'eau, qui s'avéra être l'attraction(Russian) A circus act that can occupy up to the entire second half of a circus performance. majeure de l'établissement, accueillit les plongeons et les évolutions d'une naïade professionnelle, Agnes Beckwith, « la plus grande nageuse du monde, » qui, selon sa publicité, s’était produite devant le Prince et la Princesse de Galles. La Princesse fut probablement mentionnée pour des raisons de convenance, car se produire en maillot de bain pour le notoirement dissipé Prince de Galles (le futur Édouard VII) n'était pas nécessairement un exploit dont une honnête femme pouvait se vanter…

Pour la saison d'été, le bâtiment retrouva sa vocation première, et redevint les Arènes Nautiques, la piscine couverte qui était le projet initial de Joseph Oller. Ce fut un fiasco complet ! Oller n'avait pas tenu compte du fait qu'en été, les Parisiens fortunés préféraient quitter la capitale et se rendre dans d'élégantes stations balnéaires comme Deauville, Biarritz, Nice et Monte Carlo, où les casinos et les hippodromes s'ajoutaient aux sains plaisirs de la plage (et souvent les supplantaient). Qu'il fût annoncé sous le nom d'Arènes Nautiques ou de Bains du Nouveau Cirque, ce concept de piscine couverte ne prit jamais son essor. Il fut vite abandonné, mais le cirque, lui, resta—une heureuse arrière-pensée qui rentabilisa l'investissement d'Oller.

Pantomimes nautiques

Affiche pour La Grenouillère (1886)
La saison 1886-87 s'ouvrit avec le numéro d'éléphants de Samuel Lockhart, qui prouva, s'il en était besoin, que le support de la piste était suffisamment solide pour supporter leurs évolutions. Les célèbres écuyères Adelina Price et Elvira Guerra vinrent renforcer le département équestre, Foottit consolida sa position de clownGeneric term for all clowns and augustes. '''Specific:''' In Europe, the elegant, whiteface character who plays the role of the straight man to the Auguste in a clown team.-vedette, les Hanlon-Volta confirmèrent que le Nouveau Cirque pouvait accueillir un grand numéro de trapèze volant, et les Johnson Swimmers (hommes et femmes) exposèrent leurs gracieuses anatomies dans le bassin. Mais l'événement qui allait définir le Nouveau Cirque se produisit en décembre 1886 : La Grenouillère fut la première d'une longue série de pantomimes nautiques.

Cette pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., dont le scénario très simpliste avait été conçu par Raoul Donval (qui allait être intimement associé au Nouveau Cirque trois ans plus tard) et Pierre Delcourt (1852-1931), sur une partition musicale de Laurent Grillet (1851-1901), directeur musical du Nouveau Cirque, s'inspirait du célèbre café-flottant du même nom. Facilement accessible en train depuis Paris, La Grenouillère était située en bord de Seine, près de Bougival, et avait été jadis visitée par Napoléon III et sa famille, ce qui en fit une destination bourgeoise à la mode. Peint par Claude Monet et Auguste Renoir et cadre d'une nouvelle de Guy de Maupassant, son seul nom évoquait le plaisir et les ébats nautiques—ce que le Nouveau Cirque offrit à ses spectateurs, avec d'attrayantes naïades batifolant dans la piscine et des clowns qui y tombaient inexorablement avec force éclaboussures.

Pas très raffiné peut-être, mais ce fut un énorme succès. Si les pantomimes du Nouveau Cirque qui suivirent restèrent aussi simplistes et infantiles que La Grenouillère (bien qu'elles fussent créées pour divertir un public majoritairement adulte), elles n'en furent pas moins somptueusement produites, avec des décors élaborés, une mise en scène complexe et des effets spéciaux inattendus qui les rendaient visuellement spectaculaires. Elles offraient le genre de spectacle qui poussa Jean Cocteau à évoquer, en 1935, le Nouveau Cirque, alors disparu : « Le point culminant du programme était la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances).. L’arrivée de l’eau me laisse un regret poignant. Aucun truc, aucun gag du cinématographe ne remplacera cette merveille : débarrassée du tapis-brosse, la piste verte s’enfonce avec une sourde rumeur. Des petits panaches d’eau jaillissent entre les planches. Et voilà que sur le cirque, devenu bassin, un décor s’échafaude. » (Portraits-Souvenir 1900-1914)

Henri Agoust (1889)
Une autre pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., écrite par Henri Agoust (1840-1901) et intitulée La Foire de Séville suivit en mars 1887, mais celle-ci, qui comprenait chants et danses et une bonne dose de comédie dont une parodie de corrida, n'utilisa pas la piscine et resta au sec. Henri Agoust, qui avait été nommé régisseur(French) The stage (or ring) manager—and sometimes Ringmaster—in a French circus. (See also: Monsieur Loyal) chargé des spectacles et des pantomimes, était un ancien jongleur avec une solide formation de ballet et de mime ; sa femme, Rosita Zanfretta, issue d'une vieille famille de cirque, s'était fait un nom avec un numéro de trapèze volant dans lequel elle devint Azella, « La Femme Léotard. » Agoust, qui fut longtemps associé aux célèbres acrobates et pantomimistes Hanlon Brothers, conçut et chorégraphia plusieurs ballets.

C’est le clown Tony Grice qui dirigea la pièce de résistance de La Foire de Séville : sa parodie de corrida. Un clown populaire, Grice avait rejoint le Nouveau Cirque l'année précédente avec son jeune assistant noir, un ancien esclave cubain qu'il avait trouvé en Espagne et surnommé Chocolat—un sarcasme racial peu subtil qui semblait drôle à l'époque. Chocolat deviendra bientôt un pilier du Nouveau Cirque et il écrira avec George Foottit une page importante de l'histoire française du cirque et des clowns.

La compagnie fit une tournée provinciale pendant les vacances d'été et, pour l'ouverture de la saison 1887-88, le Nouveau Cirque reprit La Grenouillère, qui remplit la salle une fois encore, puis lança en décembre une nouvelle pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., Le Carnaval de Venise, avec la participation d'un groupe de chanteurs napolitains, quelques gondoles, une pléiade de danseuses et de naïades, et l'inévitable dégringolade des clowns dans l'eau, le tout sur les airs « italiens » du chef d’orchestre Lucien Grillet (qui dirigeait une quarantaine de musiciens). Comme d'habitude, la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). occupait la dernière partie d'un spectacle en trois actes, dans lequel Tony Grice et George Foottit se disputaient la place de clownGeneric term for all clowns and augustes. '''Specific:''' In Europe, the elegant, whiteface character who plays the role of the straight man to the Auguste in a clown team.-vedette—avec un avantage grandissant pour Foottit. Le Carnaval de Venise fut un autre triomphe qui dura jusqu'en mars 1888.

Il fut immédiatement suivi d'un autre spectacle aquatique, La Noce de Chocolat, qui allait devenir la plus célèbre des pantomimes du Nouveau Cirque et sera reprise(French) Short piece performed by clowns between acts during prop changes or equipment rigging. (See also: Carpet Clown) à plusieurs reprises. Mise en scène (et probablement conçue) par Henri Agoust, elle racontait l'histoire d'un mariage dans une guinguette telle qu'on en trouvait autour de Paris, sur les bords de la Seine et de la Marne. Le marié était noir et sa future épouse était une charmante jeune fille blanche… Les jeunes mariés célébraient gaiement leur union, en musique, avec chants, danses et gags, lorsqu'un groupe de fêtards envahit la fête avec l'intention d'enlever la mariée, sans-doute pour la « sauver » d'un mari noir ! Une bagarre s'ensuivait et finalement, conformément à la tradition, tout ce beau monde tombait à l'eau…

Affiche pour La Noce de Chocolat(1888)
Le rôle du marié était tenu par Chocolat, dont c’était le premier rôle en vedette (il n’avait été jusqu'alors qu'un personnage comique occasionnel ou le contre-pitre de Tony Grice). Chocolat était un bon danseur et il était très agile physiquement. Comme il était noir, le public de l'époque s'attendait à ce qu'il fut ridiculisé, mais Chocolat avait une vraie nature comique, que George Foottit et ses collègues avaient déjà remarquée, et il avait une personnalité attachante qui plaisait au public. N'ayant eu aucune formation préalable en danse, en acrobatie ou en comédie, son personnage était encore un peu brut, mais il était ce qu'on appelle dans le spectacle « un naturel. » La Noce de Chocolat fut, de toutes les pantomimes du Nouveau Cirque, la plus réussie jusqu'alors. Mais le reste du spectacle incluait aussi Caviar, l'ours écuyer, qui fit également sensation, et Le Figaro nota avec enthousiasme : « Avec Caviar et La Noce de Chocolat, il y a de quoi faire courir tout Paris pendant des mois au Nouveau Cirque. » Ce que tout Paris s'empressa de faire jusqu'à la fin de la saison.

Le 1er octobre 1888, la nouvelle saison débuta avec une autre pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., Lulu, écrite par le célèbre journaliste et auteur de romans légèrement érotiques, Félicien Champsaur (1858-1934). Mise en scène par Henri Agoust, cette fantaisie poétique mettait en scène Mlle Massoni, qui incarnait Lulu, une clownesse qui avait perdu son cœur (littéralement), Agoust en vieux professeur pédant et Foottit en dandy nommé Arlequin. Un essaim de jolies filles vêtues de costumes collants qui révélaient leurs formes complétait la distribution. C'était en fait bien innocent mais la réputation sulfureuse de Champsaur suffit à faire courir à nouveau les Parisiens au Nouveau Cirque. (En 1900, Champsaur fera revivre Lulu dans un roman à succès intitulé Lulu, Roman Clownesque.)

Le bassin aquatique ne fut cependant pas oublié : il servit à présenter un « combat naval » avec des bateaux de guerre miniatures. Puis, en décembre, il fut le théâtre d'une nouvelle pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., toujours mise en scène par Agoust, L'île des Singes. Chocolat qui l'avait inspirée, en fut une fois encore l'interprète principal ; la pièce était construite autour de la musique et des danses des esclaves cubains, avec une histoire qui se déroulait sur une île des Caraïbes où un groupe de singes espiègles semait le chaos, et finissait par malmener le pauvre Chocolat, cuisinier du propriétaire de la plantation, joué par Foottit. Avec quelques claquements de fouet, Foottit rétablissait l'ordre, ce qui entraînait une série de situations comiques et, comme d'habitude, tout le monde finissait dans l'eau…

L'arrivée de Raoul Donval

Raoul Donval (c.1880)
Ce fut la dernière pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). mise en scène sous le règne de Joseph Oller. Il démissionna de son poste directorial à la fin de l'année pour poursuivre d'autres projets, parmi lesquels la création du Bal du Moulin-Rouge et des Montagnes Russes qu'il érigera sur le boulevard des Capucines, à l'emplacement desquelles il construira ensuite l'Olympia, le premier music-hall de style britannique de Paris (qui est toujours actif). Léopold Loyal prit la direction intérimaire du Nouveau Cirque, tandis que ses actionnaires cherchaient un successeur à Oller. Il fallait agir vite : l'Exposition Universelle de Paris devait ouvrir ses portes en mai 1889, et il allait falloir mettre les bouchées doubles pour profiter des millions de visiteurs qui allaient affluer dans la capitale.

Léopold Loyal reprit deux succès confirmés du Nouveau Cirque, La Noce de Chocolat en février et La Foire de Séville en mars, et les Parisiens découvrirent un danseur japonais très talentueux et, à leurs yeux, très exotique, surnommé « Little All Right » (son vrai nom était Umekichi Hamaikari), que Richard Risley Carlisle, le célèbre « Professeur Risley » qui créa les jeux icariens, avait rapporté de ses tournées au Japon. La direction intérimaire de Loyal prit fin le 9 juin 1889, lorsque le successeur d'Oller, Raoul Donval (1852-1898), fut enfin nommé directeur du Nouveau Cirque ; il le dirigera avec beaucoup de succès pendant les huit années suivantes, durant lesquelles le cirque de la rue Saint-Honoré entra dans son âge d'or.

Fils de gendarme, Raoul Donval était né Arthur Théobald Gilloreau le 19 février 1852 à Noailles, petite commune de l'Oise, près de Paris. Il débuta sa vie professionnelle comme télégraphiste aux Chemins de Fer du Nord, mais il était attiré par la scène et décida de devenir comédien. En 1877, à vingt-cinq ans, il fit ses débuts au Théâtre de l'Athénée à Paris dans le rôle secondaire de… Césarius, directeur de cirque, dans la comédie en un acte de Richard O'Monroy, On demande un homme fort. Cette même année, il épousa la chanteuse comique Thérèsa (née Emma Valladon, 1837-1913), qui lui proposa de changer son nom en Donval, fait des première et dernière syllabes inversées de son nom légal (Valladon), et qui sonnait mieux que Gilloreau.

S'il travailla régulièrement, la carrière d'acteur de Donval n'en fut pas moins un peu terne, mais, doté d'un bon sens des affaires, il organisa des tournées théâtrales puis prit la direction de l'Alcazar d'Hiver, célèbre café-concert parisien, très probablement avec l'aide de sa femme : elle était la principale attraction(Russian) A circus act that can occupy up to the entire second half of a circus performance. de l'Alcazar. Surnommée « La diva du caf' conc' », Thérèsa fut la première véritable superstar internationale française (avant Sarah Bernhardt et Yvette Guilbert) ; Donval organisa pour elle des tournées hors des frontières qui la conduisirent jusqu'à Saint-Pétersbourg en Russie. Thérèsa gagna une fortune et prit sa retraite en 1893. Elle divorça de Donval trois ans plus tard.

Geronimo Medrano (c.1885)
L'été, Raoul Donval dirigeait le Casino de Saint-Valéry-en-Caux, petite station balnéaire sur la côte normande. Donval y avait été recommandé par Edmond Blanc, éleveur de chevaux et homme politique, et par son frère Camille, propriétaire du Casino de Monte-Carlo (créé par leur père, François Blanc) ; les Blancs faisaient partie du cercle professionnel d'Oller et étaient probablement actionnaires du Nouveau Cirque. Raoul Donval connaissait déjà le cirque parisien, pour lequel il avait écrit La Grenouillère, et il côtoyait régulièrement des artistes de cirque et de variétés ; pour les frères Blanc, son passage réussi à la tête du casino de Saint-Valery-en-Caux était un plus qui les séduisait : il avait les qualités requises pour le poste ! Donval laissa la direction de l'Alcazar à son épouse et s'installa rue Saint-Honoré.

Un mois avant l'arrivée de Donval, Geronimo Medrano, le clown vedette du Cirque Fernando et son Régisseur Général, avait quitté le cirque qui l'avait rendu célèbre (Fernando était en difficulté financière) pour rejoindre la compagnie du Nouveau Cirque. Medrano était populaire parmi les artistes et avait amplement prouvé sa compétence en tant que régisseur(French) The stage (or ring) manager—and sometimes Ringmaster—in a French circus. (See also: Monsieur Loyal) ; Donval lui confia l'ancien poste de Léopold Loyal : en mauvaise santé, Loyal avait décidé de prendre sa retraite ; il mourra quelques mois plus tard, le 19 décembre 1889. Son fils Paul lui succéda comme maître de manège, et il semble qu'Henri Agoust quitta le Nouveau Cirque à cette époque.

Bien que Medrano ait été acrobate et trapéziste, de même qu'un dresseur de chevaux compétent, pour les clowns du Nouveau Cirque, il était un des leurs, ce qu'ils virent d'un œil acquiesçant. Ils avaient en plus un allié de poids en la personne de Donval lui-même, un bon vivant doté d'un robuste sens de l'humour, qui s'intéressait à la comédie clownesque : en 1896, il publiera un précieux petit livre, Pantomimes du Vieux Cirque, un répertoire de scènes comiques et des entrées de clowns qui avaient été jouées dans l'ancien Cirque Olympique du boulevard du Temple. Sous le règne de Donval, des clowns comme Pierantoni et Saltamontes, Medrano, et surtout Foottit et Chocolat, deviendront les principaux atouts du Nouveau Cirque, au même titre que le bassin d'eau dans lequel ils tombaient occasionnellement.

Paris au Galop

Affiche pour Paris au Galop (1889)
Pour profiter pleinement du flot de touristes attendus à l'Exposition Universelle, connue simplement sous le nom d'Expo, Donval maintint le cirque ouvert pour tout l'été et ajouta même quelques matinées supplémentaires. Il fit également installer deux rangées de fauteuils sur la périphérie du promenoir, qui le transformèrent en balcon et montèrent la capacité d'accueil de la salle à 1 170 places. Au-delà de l’Expo, de tels changements augmentèrent sensiblement la rentabilité du Nouveau Cirque.

L'Expo était centrée sur les extraordinaires réalisations de la nouvelle ère industrielle, spectaculairement illustrées par la magnifique tour de 300 mètres de Gustave Eiffel. Avec son étonnante piste transformable et sa technologie révolutionnaire, le Nouveau Cirque correspondait parfaitement au tableau, sans compter qu'il offrait également d'excellents spectacles. Donval reprit le premier succès du Nouveau Cirque, La Grenouillère, sa propre pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). aquatique, qui en resta l'attraction(Russian) A circus act that can occupy up to the entire second half of a circus performance. principale (et pour Donval, une lucrative source de droits d'auteur) jusqu'à la fin de l'Expo, le 31 octobre.

En seulement six mois, l'Expo avait accueilli plus de 32.000.000 de visiteurs, dont beaucoup venaient des provinces françaises et de pays étrangers. Paris avait vécu un été de fête et de divertissements qui prit fin tout d'un coup ! Après une « gueule de bois » initiale, les Parisiens commencèrent à souffrir d’un « manque d'Expo. » Donval, prenant le pouls de la ville, demanda à deux librettistes bien connus, Surtac et Alévy (Gabriel Astruc, 1864-1938, et Armand Lévy, 1859-1935), d'écrire pour le Nouveau Cirque une revue qui retracerait les principaux événements de l’année—ce qui était le but initial des revues, avant qu’elles ne se transforment lentement en d'extravagants spectacles dénués de tout sens au XXe siècle.

Surtac et Alévy avaient fait un carton au Cirque Fernando au début de l'année avec une revue qu'ils avaient écrite pour Geronimo Medrano, En selle pour la revue, et c'est probablement Medrano qui, en tant que Régisseur Général, fut à l'origine de la revue du Nouveau Cirque : jusqu'à En selle pour la revue de Fernando, écrite et réalisée à la demande de Medrano, les revues avaient été exclusivement présentées sur scène. Paris au Galop débuta au Nouveau Cirque le 13 novembre 1889. Il s'agissait d'une « revue équestre et nautique » qui se déroulait entre les quatre piliers d'une tour Eiffel faite d'un assemblage élaboré de cordages.

Eduard Deyerling au Nouveau Cirque (1890)
Paris au Galop fut un triomphe de plus, encensé par la critique et adoré du public ; cette pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). concordait parfaitement avec la nostalgie des Parisiens pour leur défunte Expo. En décembre 1889, le célèbre auteur et critique de théâtre Jules Lemaître (1853-1914) notait dans ses Impressions de Théâtre (1901) : « Telle est la mystérieuse supériorité du reflet de la lune et du souvenir de l'amour sur l'amour et sur la lune et de l'image feinte sur la réalité, — lorsque le plancher a laissé jaillir l'eau et s'est enfoncé peu à peu ; quand la tour fragile du Nouveau-Cirque s'est mise à flamboyer dans la rouge auréole des feux de Bengale ; lorsqu'enfin un pinceau de lumière colorée, venue des frises, s'est abattu sur le maigre jet d'eau central afin de reproduire la féérie des "fontaines lumineuses," nous avons tous revu les spectacles de cet été, et je crois que nous avons été plus contents et plus éblouis que nous ne le fûmes jamais par les plus fantastiques soirées du Champs-de-Mars. »

Mais les pantomimes et les revues ne furent pas les seules choses qui attirèrent le public au Nouveau Cirque. Par exemple, les lions (et un dogue allemand) de Carl Hagenbeck présentés par Darling (de son vrai nom Eduard Deyerling) figuraient dans le même programme que Paris au Galop, et ils y firent sensation. Les lions de Darling reviendront plusieurs fois au Nouveau Cirque. Ils étaient présentés dans une cage très ornée qui surgissait hydrauliquement de la banquette(French. U.S.: Ring Curb. Russian: Barrier) The circular barrier that defines the ring—so called because it is traditionally large enough for someone to sit on it. de piste tandis, que le plancher de celle-ci était abaissé de quatre-vingt centimètres, et deux grands panneaux grillagés qui s'ouvraient sur chaque côté de l'entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. de piste en protégeant les spectateurs permettaient de faire entrer les lions à travers le rideau (comme le font souvent, aujourd'hui, les cirques russes) ; cette large entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. permettait aussi au char romain tiré par ses lions que guidait Darling d'entrer en piste toute sécurité. Tout cela, la technologie comme le spectacle, était extraordinaire et alimentait les conversations.

Foottit & Chocolat

Affiche pour À la Cravache (1890)
Ses clowns contribuèrent aussi largement au succès du Nouveau Cirque : George Foottit, Tony Grice, « Boum-Boum » Medrano, Alexandre Pierantoni et son partenaire, le clown espagnol Saltamontes, et bien-sûr Chocolat, parmi d'autres. Foottit, qui était, comme tous ses collègues, conscient du potentiel de Chocolat avait demandé à Donval de l'embaucher indépendamment de Tony Grice, dont Chocolat avait été l'assistant en piste et le domestique dans la vie privée. Chocolat devint ainsi un homme vraiment libre et un clown à part entière. Comme auparavant, il travailla comme partenaire d'autres clowns, parmi lesquels Pierantoni, Medrano et Foottit. Il écrira éventuellement un chapitre de l'histoire des clowns avec Foottit, mais ce chapitre avait déjà commencé au Nouveau Cirque avec un autre duo de clowns, Pierantoni et Saltamontes.

Pierantoni et Saltmaontes, qui n'avaient jamais travaillé ensemble avant leur « mariage » au Nouveau Cirque, avaient été suggérés à Raoul Donval par Félix Gontard, un des tout premiers augustes, qui les avait vus travailler, indépendamment l'un de l'autre, au Portugal. Pierantoni et Saltamontes commencèrent à travailler ensemble occasionnellement rue Saint-Honoré, comme c'était l'habitude chez les clowns, mais leur partenariat créa une alchimie particulière que le public adorait : ils se complétaient parfaitement. Encouragés par Donval et Medrano, ils formèrent finalement un duo de clowns distinctif et créèrent leur propre répertoire—les premiers clowns à le faire&madash;aussi surprenant que cela puisse paraître aujourd'hui (du moins pour un public européen).

Puis, en décembre 1890, le Nouveau Cirque présente une autre revue de Surtac et Alévy, À la Cravache, dans laquelle Foottit fit la une des journaux. La grande tragédienne Sarah Bernhardt incarnait alors Cléopâtre dans la pièce éponyme de Victorien Sardou ; comme d'habitude, elle obtint un immense succès, mais sa surinterprétation, qui était alors conventionnelle et très admirée, invitait à une parodie facile—en particulier la grandiloquence tragique de l'interminable scène de la mort de Cléopâtre—et Foottit sauta sur l'occasion. Sa parodie était hilarante : la Sarah-Cléopâtre de Foottit, avec son opulente crinière rouge, sa robe ornée de bijoux en toc, et son fatal serpent en caoutchouc, n'en arrêtait plus de mourir avant de finalement ressusciter. La parodie de Foottit, dans laquelle Chocolat jouait un esclave et Saltamontes était Marc Antoine, devint rapidement un sujet de conversation dans les salons.

Poster pour Foottit & Chocolat (1895)
Les inconditionnels de la tragédienne s'en offusquèrent, notamment son auteur, Victorien Sardou, ce qui transforma la parodie de Foottit en un mini-scandale parisien. Finalement, la grande tragédienne décida de juger par elle-même et alla au Nouveau Cirque voir Foottit dans ses œuvres. Une véritable diva s'il n'en fut jamais, la grande Sarah fit une entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. tardive très remarquée avec son entourage qui stoppa pratiquement le spectacle quelques instants avant le tour de Foottit. Quand Foottit entra en piste, la salle se figea lorsque Madame Sarah hurla un péremptoire « Clown, fais-moi rire ! », qui aurait eu de quoi paralyser n'importe quel comédien, quel que fût son talent. Pourtant Foottit ne broncha pas et continua sa satire, et Madame Sarah rit de bon cœur. Non seulement le scandale s'était dissipé, mais il généra une excellente publicité pour le Nouveau Cirque.

C'est à cette époque que Foottit commença à travailler régulièrement avec Chocolat (même si Chocolat continua à travailler occasionnellement avec d'autres partenaires). Il y avait en effet une alchimie exceptionnelle entre eux, bien que différente de celle de Pierantoni et Salamontes : alors que ces derniers affichaient en piste des relations amicales et chaleureuses, Foottit et Chocolat entretenaient une relation antagoniste, dans laquelle Foottit était le patron autoritaire du malheureux Chocolat—même si, comme le démontrent les premiers films que Louis Lumière fit du duo, l'un ou l'autre pouvait indifféremment triompher de son partenaire.

Ce qui était particulièrement intéressant, cependant, c'est que les personnages du duo étaient clairement définis : Foottit, un clown blanc portant le costume traditionnel issu de la tradition des bouffons médiévaux, était le meneur du duo ; Chocolat était un augusteIn a classic European clown team, the comic, red-nosed character, as opposed to the elegant, whiteface Clown., un personnage ordinaire qui n'avait pas les talents présumés et les atours artificiels du clownGeneric term for all clowns and augustes. '''Specific:''' In Europe, the elegant, whiteface character who plays the role of the straight man to the Auguste in a clown team., et dont l'humour venait de sa difficulté à s'adapter aux codes bien établis de la société dans laquelle il essayait d'évoluer. Les personnages et les rôles du duo étaient parfaitement définis par leurs relations en piste, ainsi que par leur apparence physique. Le contraste d’un visage blanc et d’un autre noir ajouta à cette distinction.

Foottit et Chocolat sont à l'origine du duo traditionnel formé par un clown et un augusteIn a classic European clown team, the comic, red-nosed character, as opposed to the elegant, whiteface Clown., qui fera des émules par la suite, lorsque d'innombrables duos du même type apparurent. Mais leur considérable succès vint aussi des sketches qu’ils présentaient. Il s'agissait pour la plupart de vieilles entrées jouées depuis des temps immémoriaux—mais comme Chocolat était bien trop indiscipliné pour qu'on le laissa improviser, Foottit donna à ces entrées une structure solide, avec un début, un milieu et une fin que les partenaires devaient respecter. Ces vieilles entrées devinrent ainsi de bien meilleures pièces de comédie, acquérant une logique cohérente et adaptée à la personnalité des clowns qui les jouaient. Foottit & Chocolat avait redéfini la comédie clownesque telle qu'elle se développera au vingtième siècle en Europe, et particulièrement en France.

Les étoiles de Donval

Affiche pour Isabelle Chinon (c.1890)
Le public du Nouveau Cirque ne se lassait pas de voir Foottit & Chocolat jouer ensemble : ils devinrent rapidement les enfants chéris du public parisien, notamment Chocolat, qui, la nuit, rejoignait la bohème de Montmartre, où il fut immortalisé par Toulouse-Lautrec. Mais ils n'étaient pas les seules vedettes qui se produisaient au Nouveau Cirque en dehors de ses pantomimes et revues. Le noyau initial du public du Nouveau Cirque était en grande partie constitué des relations qu'Oller s'était faites dans le monde des courses, dont les membres du Jockey Club qui s'intéressaient beaucoup à l'équitation sous toutes ses facettes. De plus, tout le monde à l'époque s'intéressait aux chevaux, encore indispensables à la vie quotidienne, de l'agriculture aux transports, de la guerre aux loisirs. Et pour voir des chevaux dans leur meilleure lumière, on allait au cirque. Le Nouveau Cirque, comme avant lui le vénérable Cirque des Champs-Élysées, était le rendez-vous privilégié des véritables amateurs d'équitation.

Sous la direction de Donval, quelques-uns des plus grands noms des arts équestres furent présentés au Nouveau Cirque : la superbe Elvira Guerra; l'éblouissante Baronne de Rahden, dont le cheval sortait de piste "en cabrade", debout sur ses jambes postérieures, avec la Baronne, montant en amazone, renversée tête en bas sur la croupe de son cheval (créé par Jenny de Rahden, ce "cabré renversé" devint, des années plus tard, l'image de marque de Paulina Schumann), Isabelle Chinon, une des rares femmes à monter en haute-école(French) A display of equestrian dressage by a rider mounting a horse and leading it into classic moves and steps. (See also: High School) assise à califourchon sur son cheval comme ses homologues masculins ; l'incomparable James Fillis, qui venait d'écrire la nouvelle bible de l'écuyer, Principes de dressage et d'équitation (1890) et attira en masse les officiers de cavalerie(French) The ensemble of the horses in an equestrian circus. rue Saint-Honoré ; et l'écuyère Blanche Allarty, l'élève et protégée du maître-écuyer Ernest Molier, dont le célèbre Cirque d'amateurs qu'il présentait chaque année dans la cour de son hôtel parisien, rue de Bénouville, attirait la même foule d'amateurs d'arts équestres que le Nouveau Cirque.

Il y avait aussi les grandes stars d'autres disciplines du cirque : les célèbres jongleurs Severus Schaeffer, qui pimentait son numéro d'acrobaties, et Paul Cinquevalli, la première véritable star internationale de la jonglerie ; les Ancilotti, « Premiers vélocipédistes du monde, » qui exécutaient d'extraordinaires exercices d'acrobaties et d'équilibre sur leurs grands bis et leurs monocycles ; Edmond Rainat, incontestablement le plus grand spécialiste du trapèze volant de bâton à bâton (sans porteur) avec ses partenaires, et, dans la même spécialité, la troupe de Raoul Monbar, principal concurrent de Rainat ; Miss Athleta (Maria van Huffelen), l'incroyable athlète belge qui pouvait faire honte à n'importe quel homme fort ; les troupes roumaines Popescu et Luppu dans leurs superbes acrobaties aux barres fixes, et bien d'autres étoiles de la piste.

Revues et Pantomimes

Cependant, les pantomimes et les revues demeuraient les principales attractions du Nouveau Cirque, et une longue série d'entre elles, anciennes et nouvelles, furent produites sous la direction de Donval, la plupart écrites par des auteurs et librettistes bien connus. Une d’elles, particulièrement, mit en scène la célèbre « diseuse » Yvette Guilbert (1865-1944), grande vedette des variétés (et l'un des sujets favoris de Toulouse-Lautrec), qui interprétait le rôle de « La chanteuse » dans Garden-Party (1891), pièce humoristique écrite par le romancier Pierre Delcourt (1852-1931) et le librettiste Victor Meuzy, sur une musique du prolifique directeur musical du Nouveau Cirque, Laurent Grillet. Guilbert, qui était une immense célébrité, fit salle comble.
Affiche pour Garden Party avec Yvette Guilbert (1891)

1891 vit également Gribouille, une « pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). villageoise à grand spectacle » de Bid et Talbert, et Le Roi Dagobert, qui comprenait une spectaculaire chasse au cerf qui se terminait, comme d'habitude, dans la piscine. Surtac et Alévy revinrent en janvier 1892 avec une nouvelle revue, À fond de train, qui comprenait des parodies par les clowns vedettes du Nouveau Cirque, de nombreux chevaux, la piscine et un essaim de jolies filles. Don Quichotte", une « bouffonnerie équestre à grand spectacle » suivit, avant une reprise(French) Short piece performed by clowns between acts during prop changes or equipment rigging. (See also: Carpet Clown) du Roi Dagobert qui conclut la saison.

En octobre 1892, la nouvelle saison débuta par une reprise(French) Short piece performed by clowns between acts during prop changes or equipment rigging. (See also: Carpet Clown) de Gribouille avant la présentation du dernier opus de Raoul Donval, une « fantaisie japonaise et nautique à grand spectacle » en deux tableaux sur une musique de Laurent Grillet intitulée Papa Chrysanthème—une parodie du roman stéréotypé de Pierre Loti, Madame Chrysanthème (1887). Au lieu d'un grand plongeon dans la piscine, le deuxième tableau offrait un « ballet de nénuphars » par un groupe de naïades aguicheuses. Papa Chrysanthème demeura à l'affiche jusqu'en 1893.

En avril, Foottit était le héros de la « pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). à grand spectacle » Pierrot Soldat, une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). classique revisitée pour l'occasion, dans laquelle Pierrot était un malheureux appelé qui tentait de s'adapter à la vie militaire, et où les ordres de ses supérieurs, pris au pied de la lettre, aboutissaient à des situations désopilantes. Il s'agissait d'une version allongée de ce qui allait devenir plus tard une entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. clownesque classique, Le service militaire.

La dernière offre de la saison 1892-93 était une « folie nautique » intitulée La Rosière de Charenton. (Une rosière était une jeune fille de village, distinguée et célébrée pour sa chasteté, généralement à l'occasion d'une foire ou d'une fête ; quant à Charenton, c'était alors un petit bourg parisien au bord de la Seine et de la Marne.) Foottit incarnait un journaliste anglais, et Chocolat était « un prince du Dahomey » qui était pris pour un serviteur ; il y avait beaucoup de dégringolades aquatiques et, à la fin, Chocolat prenait sa revanche en détruisant le podium sur lequel se tenaient la rosière et les officiels, faisant ainsi tomber tout le monde à l'eau…

La saison 1893-94 s'ouvrit avec Le Yacht de Monsieur Durand, qui ne parvint jamais à traverser la piscine du Nouveau Cirque : il y coulait joyeusement chaque nuit de façon spectaculaire ! Émile Blavet, chroniqueur du quotidien parisien Le Figaro, qui signait ses critiques « Un Monsieur de l'orchestre, » nota que de telles pantomimes « n'ont pas la prétention de nous faire réfléchir, elles se contentent de nous faire rire. Et c'est là que réside le secret du succès continuel des pantomimes de M. Donval… » M. Durand et son yacht coulèrent donc à chaque représentation, provoquant une hilarité générale dans les gradins, jusqu'à ce que Boule de Siam, une somptueuse « pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). à grand spectacle, » lui succède en janvier 1894.
Affiche pour Boule de Siam (1894)

Titrée en référence à la nouvelle Boule de Suif (1880) de Guy de Maupassant, mais sans aucune autre parenté avec celle-ci, c'était une pièce spectaculaire et pleine d'exotisme, avec de sensuelles bayadères, des charmeurs de serpents, des explorateurs intrépides, et les éléphants de Lockhart qui jouaient des instruments de musique. Foottit y était un explorateur anglais qui, à un moment donné, était décapité par un serpent (une vieille illusion clownesque), ce qui amenait son collègue à remarquer : « Pas de problème, ça m'est arrivé plusieurs fois ! » Chocolat y était le héros de la farce, incapable d'épouser la fille qu'il aimait à cause de la couleur de sa peau (celle de la fille…). Finalement, les explorateurs résolvaient le problème en blanchissant Chocolat avec un « procédé américain »—et non l'inverse, racisme colonial obligeant ! Donval n’avait certainement pas la prétention de faire réfléchir son public…

En mars 1894, le Nouveau Cirque présenta à nouveau une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). construite autour d'une vedette de café-concert, cette fois le très populaire chanteur londonien Harry Fragson (1869-1913). C'était L'agence Bidard, qui était prétexte à une imaginaire audition de talents, dont les candidats étaient soit de jolies filles, soit des clowns, avec Chocolat, vêtu d'une robe brodée de fausses perles et de diamants, dans une imitation irrésistible de Caroline Otéro—dite « La Belle Oréro » (1868-1965), célèbre danseuse, actrice occasionnelle, et courtisane attitrée des têtes couronnées. Bien sûr, Fragson était le dernier à « auditionner » et obtenait son succès habituel. C'était une authentique pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., mais c'est surtout Fragson qui attira son large public.

"Le Moulin du gué", la « folie nautique » qui suivit, était une autre version étirée de la classique entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. du « service militaire. » A la fin de la pièce, des soldats récalcitrants tentaient de s'enfuir et étaient pourchassés par leur sergent et ses hommes ; finalement, alors qu'ils essayaient de traverser une rivière sur un gué glissant, ils tombaient tous à l'eau… Ce ne fut probablement pas la meilleure des pantomimes du Nouveau Cirque, mais elle bénéficia de la visite du prince de Galles (bientôt Edward VII), qui aurait certainement préféré voir Chocolat dans sa parodie d'Otéro : elle était, disait-on, une de ses « connaissances » ! La saison s’acheva sur la reprise(French) Short piece performed by clowns between acts during prop changes or equipment rigging. (See also: Carpet Clown) d'un classique au succès inusable, La Noce de Chocolat.

Changement de décor

L'Hippodrome de l'Alma (c.1880)
Pendant ce temps, le paysage du cirque parisien commençait à changer. Le plus ancien cirque de Paris, le Cirque des Champs-Élysées (ouvert en 1843), également connu sous le nom de Cirque d'Été, avait perdu une bonne partie de sa clientèle passionnée d'arts équestres au profit du Nouveau Cirque, et sa vétusté n'était devenue que trop évidente. Ouvert uniquement pendant l'été (le Cirque d'Hiver était son homologue hivernal), durant lequel il était en concurrence avec l'immense Hippodrome de l'Alma, il était devenu de plus en plus obsolète et fermera ses portes en 1899. À Montmartre, la situation financière de Louis Fernando était devenue telle qu'il finit, en 1897, par quitter son cirque à la cloche de bois : le bâtiment, qui avait appartenu depuis longtemps à ses créanciers, sera récupéré par Geronimo Medrano.

Mais avant cela, l'énorme et ultramoderne Hippodrome de l'Alma (il possédait, entre autres commodités, une immense verrière coulissante qui permettait au public de profiter du beau temps ou de se protéger des intempéries), qui accueillait de grands spectacles équestres très populaires et des pantomimes spectaculaires, perdit son bail foncier et, malgré un succès continu depuis son ouverture en 1877, il fut contraint de donner sa dernière représentation le 1er novembre 1892. Situé avenue de l'Alma dans un quartier en plein essor, il fut démoli pour permettre un développement immobilier.

L'entreprenant Donval vit dans la disparition de l'Hippodrome une opportunité intéressante. Avec un groupe d'investisseurs il décida d'ériger un nouvel hippodrome, baptisé Cirque-Hippodrome du Champ de Mars, dans l'ancien Palais des Beaux-Arts, un vestige de l'Exposition Universelle de 1889 qui n'était plus utilisé. Le nouvel Hippodrome ouvrit ses portes en grande fanfare en juillet 1894. Comme le précédent Hippodrome, il n'était actif que pendant la saison estivale et il deviendra la résidence d'été de la compagnie du Nouveau Cirque. Geronimo Medrano en fut nommé directeur.

Publicité pour l'Hippodrome du Champ de Mars (1894)
Pendant ce temps, le Nouveau Cirque poursuivait sa série de pantomimes à succès. Il rouvrit fin septembre 1894 avec des reprises de Papa Chrysanthème de Donval et, en novembre, Le Yacht de Monsieur Durand. Puis, fin novembre, arriva Pirouettes-Revue, la traditionnelle revue de fin d'année, qui était, nota l'hebdomadaire La Jeune Garde, moins une revue qu'une succession de tableaux dans lesquels, « parmi les ébats des clowns, de charmantes danseuses allaient et venaient, tantôt en cyclistes, tantôt en toréadors, tantôt en lutteurs complaisamment déshabillés en justaucorps rose… » Foottit était le compère de la revue ; c'était une revue joyeuse, pleine d'action et de jolies filles, mais tout à fait oubliable.

Mais America, une « bouffonnerie exotique » qui ouvrit le 12 janvier 1895, fut une de ces pantomimes nautiques qui firent se ruer les Parisiens au Nouveau Cirque. Située dans l'Ouest américain (d'où son « exotisme »), elle culminait dans la vision spectaculaire d'un train, avec sa locomotive à vapeur et son wagon à bagages, traversant un pont qui cédait sous son poids, le précipitant dans l'eau avec passagers et bagages ! S'ensuivait un joyeux bain collectif, auquel participaient des sauveteurs maladroits. C'était le genre de pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). dont Cocteau dut se souvenir lorsqu'il écrivit : « Aucun truc, aucun gag du cinématographe ne remplacera jamais cette merveille »—car, à l'époque, le cinématographe n'existait même pas : la première représentation publique d'un film des frères Lumière aura lieu cette même année au Grand Café à Paris, le 28 octobre !

La Reine de Bercy, qui suivit en avril, reprenait le thème de La Rosière de Charenton, mais sans les connotations racistes que le rôle de Chocolat avait impliquées dans cette dernière. La Reine de Bercy (un quartier parisien au bord de la Seine ou se trouvait alors la Halle aux Vins) évoquait les festivités entourant le couronnement de la rosière de Bercy. Elles se terminaient par une compétition au cours de laquelle des jeunes gens devaient grimper un poteau graisseux dressé au milieu de la piscine ; ils l'atteignaient avec une embarcation de fortune tout-à-fait instable et, alors qu'ils le grimpaient, le poteau commençait à vaciller et des feux d'artifice partaient accidentellement ; la panique s'installait et, bien-sûr, tout le monde tombait à l'eau… La saison s'acheva sur une reprise(French) Short piece performed by clowns between acts during prop changes or equipment rigging. (See also: Carpet Clown) de Pierrot Soldat, vieux cheval de guerre de Foottit, avec un décor signé Caran d'Ache.

Affiche pour Coco (1895)
Le caricaturiste et satiriste Caran d'Ache (1858-1909) naquit Emmanuel Poiré à Moscou, dans une famille française établie en Russie ; il émigra en France à l'âge de dix-neuf ans et adopta le pseudonyme professionnel de Caran d'Ache, du mot russe Карандаш (karandache), qui signifie crayon. Un pilier du très mondain Cirque Molier, Caran d'Ache imagina sa propre pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., La Petite Plage, écrite avec l'acteur et dramaturge occasionnel Arnold-Jules Fordyce. Mettant en vedette Chocolat en chef d'orchestre et Foottit en joueur de banjo, elle ouvrit la saison 1895-96. Comme son titre l'impliquait, c'était un véhicule parfait pour des gambades nautiques donnant la part belle à de séduisantes naïades, qui étaient soudainement dérangées par un phoque ! Des gendarmes maladroits venaient à la rescousse, et après des courses-poursuites dans tous les sens et une avalanche de gags, le tout se terminait en plongeons dans la piscine.

Caran d'Ache et Fordyce réitérèrent en novembre 1895 avec une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). « sèche, » Paris-Parade, qui était une ode au « Cirque romantique. » Ses atouts principaux étaient Foottit et Chocolat et un intéressant ballet aérien dans lequel un essaim de jolies filles vêtues en anges incarnaient les battants des cloches auxquelles elles étaient suspendues. Puis, le 31 janvier 1896, le Nouveau Cirque présenta une autre pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). « sèche, » Coco. Coco était Chocolat, qui incarnait un gardien d'animaux exotiques du Jardin d'acclimatation de Paris, qui était alors un mélange de parc zoologique et ethnologique exposant les curiosités humaines, animales et botaniques des colonies françaises. (Aujourd'hui parc d'attractions pour enfants, le Jardin d'acclimatation est situé dans le Bois de Boulogne).

Il est intéressant de noter que lorsque Chocolat apparaissait dans Coco et d'autres pantomimes du même type, le mot raciste fit son apparition dans le vocabulaire français (1894), suivi du concept de racisme (1902)—car une fois encore, le pauvre Chocolat (Coco) était victime d'une erreur d'identité aux connotations racistes : tentant de récupérer de nuit des animaux qui venaient de s'échapper du Jardin d'acclimatation, il était pris pour un singe… Puis, les participants de deux noces distinctes apportaient leur lot de confusion, auquel Coco contribuait, et une course-poursuite s'ensuivait avec son assortiment de gags visuels. Mais ce fut aussi l'occasion de montrer des animaux exotiques (un éléphant, un chameau, une autruche...) et Coco tint l'affiche jusqu'à la fin de mars 1896. (Le colonialisme triomphant du tournant du XXe siècle amènera bientôt les ménageries dans le giron des cirques ambulants européens.)

Les dernière années du règne de Donval

Affiche pour Paris-Pékin (1896)
Afin de rentabiliser toujours plus le Nouveau Cirque, Donval avait institué le « Cabaret du Chien Noir » (inspiré du célèbre « Cabaret du Chat Noir » de Rodolphe Salis), qui se produisait tous les soirs à 21h30 dans le foyer du premier étage du Nouveau Cirque. Comme son modèle montmartrois, il mettait en vedette des chansonniers, et les spectateurs étaient assis à des tables où des boissons leur étaient servies, ce qui était la principale source de revenus du cabaret. Il fut conçu pour attirer des clients indépendamment du cirque, mais les spectateurs du cirque pouvaient aussi le fréquenter après le spectacle.

Le Nouveau Cirque continua néanmoins de présenter des numéros remarquables et des pantomimes à succès. L'île des Bossus, qui suivit Coco fin mars 1896, mettait en vedette Foottit, dans le rôle de Pierrot, et Chocolat dans celui de son acolyte, qui débarquaient sur une île où les bossus étaient la norme et méprisaient le « dos plats. » Condamné à mort, le « dos plat » Pierrot-Foottit était sauvé par la fille du Roi, elle-même une « dos plat ». Pour une raison quelconque, toute cette affaire se terminait par une bagarre entre marins qui étaient debout dans de petits bateaux, et tout ce beau monde tombait à l'eau…

La compagnie s'installa ensuite à l'Hippodrome du Champs de Mars pour la saison estivale, et le Nouveau Cirque rouvrit fin septembre 1896 avec Paris-Pékin, une nouvelle « bouffonnerie nautique » en trois actes, dans laquelle des voyageurs embarquaient dans un train qui les emmenait en un éclair à Pékin ! Là, ils étaient divertis par un groupe de jolies « Chinoises » qui exécutaient des danses exotiques sur une musique « orientale » écrite par le toujours prolifique Laurent Grillet. Le dernier tableau, selon le journal musical Le Ménestrel du 27 septembre 1896, fut une « apothéose très réussie, avec feuilles de lotus émergeant des eaux, et laissant s'épanouir, très plastiques, de jeunes personnes aux poses langoureuses. ». Le critique, cependant, fut surtout impressionné par « l'impayable Foottit faisant manœuvrer son peloton de gamins » dans le programme qui précédait la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., ainsi que par les jeux icariens de la famille Kellino.

Après une courte reprise(French) Short piece performed by clowns between acts during prop changes or equipment rigging. (See also: Carpet Clown) de La Rosière de Charenton, l'année s'acheva sur une « pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). paysanne, » Le feu au moulin, qui était une version largement étirée de l'entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. clownesque La maison en feu. Un moulin à eau était installé au centre du bassin, dont Chocolat était le gardien, et Foottit était le chef d'une compagnie de pompiers maladroits. Il y avait le feu au moulin, et tout le monde a essayait de l'éteindre, y compris un groupe de grenouilles (c'est-à-dire d'accortes jeune filles en collants verts) ! Inutile de préciser que c'était une bonne opportunité pour un grand bain collectif !

Les 100 Kilos (1897)
Au début de 1897, Le feu au Moulin était toujours à l'affiche. Personne ne s'en doutait encore, mais 1896-97 allait être la dernière saison de Raoul Donval et de Geronimo Medrano aux rênes du Nouveau Cirque. Après Pierrot aux Enfers, qui débuta le 12 février avec Foottit dans le rôle-titre d'une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). inspirée par la légende de Faust, Raoul Donval présenta la dernière pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). dont il sera l'auteur, Les 100 kilos, une « bouffonnerie nautique » qui débuta le 16 avril. Elle s'inspirait d'une association qui existait réellement à Paris, Le Club des Cent Kilos dont les membres potentiels devaient peser au moins cent kilos pour être acceptés !

Foottit & Chocolat y étaient les serveurs incompétents d'un restaurant au bord de l'eau, où les volumineux membres du clubA juggling pin. tenaient leur réunion annuelle au cours de laquelle ils honoraient le plus lourd d'entre eux. Il y avait un « tramway aérien » qui transportait au-dessus de l'eau les clients du restaurant, sous la forme d'un simple câble doté d'un trapèze coulissant auquel devaient s'accrocher les énormes clients—ce qui permettait d'offrir à bon marché un festival de plongeons et de gags. Les tricheurs du concours de pesée étaient également jetés à l'eau—et le gag le plus réussi fut la vision de l'énorme contrepoids de cent kilos utilisé sur la balance flottant délicatement dans la piscine après avoir été renversé dans l'eau par un client particulièrement volumineux… Comme d'habitude, la musique était signée Laurent Grillet.

Ce fut l'opus d'adieu de Raoul Donval : en mauvaise santé, il décida de quitter le Nouveau Cirque à la fin de la saison. Il quitta également l'Hippodrome du Champs de Mars—mais le Palais des Beaux-Arts, où il se trouvait, devait de toute façon être démoli en 1898 pour faire place à la nouvelle Exposition Universelle de 1900. Raoul Donval mourut peu après, le 14 mars 1898 dans son appartement du 247 rue Saint-Honoré, à deux portes du Nouveau Cirque ; il n'avait que quarante-six ans. Ce soir-là, le Nouveau Cirque ne joua pas. Le décès de Donval marqua non seulement la fin d'une époque pour le Nouveau Cirque, mais il coïncida également avec la fin d'une époque pour le cirque à Paris.

Le Nouveau Cirque d'Hippolyte Houcke

Hippolyte Houcke (1889)
Le successeur appointé de Donval fut le brillant directeur de cirque Hippolyte Houcke (1852-1925), qui avait dirigé avec succès l'Hippodrome de l'Alma, maintenant disparu. Fils de Jean Léonard Houcke (1816-1877), qui avait été Régisseur du Cirque des Champs-Élysées, il appartenait à une grande dynastie française de cirque installée en Suède qui joua un rôle déterminant dans le développement du cirque scandinave—et qui marquera également de son empreinte l'histoire des cirques parisiens. Hyppolite Houcke était bien connu des amateurs de cirque à Paris, qui virent d'un très bon œil son arrivée au Nouveau Cirque.

Mais en décembre, le Nouveau Cirque perdit également son régisseur(French) The stage (or ring) manager—and sometimes Ringmaster—in a French circus. (See also: Monsieur Loyal), Geronimo Medrano : le 25 octobre, Louis Fernando, directeur du Cirque Fernando, ayant été incapable de payer son loyer au propriétaire de son cirque et du terrain qu'il occupait, il fut annoncé que l'ensemble de la propriété, terrains et murs, serait vendu aux enchères. Apparemment, la vente fut finalisée en novembre et les nouveaux propriétaires firent savoir que le cirque était à louer. Geronimo Medrano ne voulait pas voir disparaître le cirque qui l'avait rendu célèbre : il rassembla rapidement le capital nécessaire et, en décembre, devint le nouveau locataire du bâtiment. Le légendaire Medrano était né ; il allait devenir le principal concurrent du Nouveau Cirque.

Le 17 septembre 1897, le Nouveau Cirque rouvrit ses portes pour la saison 1897-98. Hippolyte Houcke reprit prudemment Les Cents Kilos, dont le succès n'était plus à démontrer. Puis, en novembre, il proposa la première pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). originale de sa direction, Au Texas, qui ramena « l'exotisme » américain de son précurseur, America, avec l'addition sensationnelle de chevaux plongeurs, une attraction(Russian) A circus act that can occupy up to the entire second half of a circus performance. populaire, quoique discutable, aux Etats-Unis, qui commençait à faire son chemin en Europe (et que le Nouveau Cirque, avec sa piscine profonde, et depuis peu le cirque Busch de Berlin, étaient les seuls cirques capables d'accueillir à l'époque).
Affiche pour les Chevaux Plongeurs (1897)

Après Au Texas, sa première revue, Hippolyte Houcke présenta Paris qui Trotte, une « revue équestre à grand spectacle » signée par Alévy et le journaliste, prolifique auteur et compositeur Adrien Vély (Adrien Lévy, 1864-1935). La presse trouva que Paris qui trotte était superficiel mais magnifiquement mis en scène. Avec Foottit & Chocolat en vedette, il incluait une reconstitution des visites d'État à l'Élysée de la Reine Wilhelmine des Pays-Bas et du Tsar Alexandre III, qui donnaient l'occasion d'exhiber des costumes flamboyants, et se terminait par un ballet sur bicyclettes (le vélo étant le dernier engouement des Français) qui mettait en scène des hommes et des femmes vêtus de blanc serpentant sur la piste sous des lumières aux couleurs changeantes. Ce fut un énorme succès.

Jusque-là, tout allait bien. Hippolyte Houcke allait cependant faire face à un défi de taille : il devait conduire le Nouveau Cirque vers le XXe siècle, qui verra les numéros acrobatiques et la présentation d'animaux exotiques et sauvages prendre progressivement le pas sur les arts équestres, qui avaient été jusqu'alors au centre des traditions du cirque. Le Nouveau Cirque était cependant bien équipé pour affronter la tempête : ses équipements techniques lui avaient déjà donné la possibilité de produire des spectacles originaux qui lui avaient donné une petite longueur d'avance. Néanmoins, le développement de l'automobile, qui remplacera à terme le cheval, l'émergence du music-hall à l'anglaise et l'avènement du cinématographe allaient profondément modifier les goûts et les habitudes du public de cirque.

Le premier changement significatif fut un nouvel intérêt pour le sport et la gymnastique qui culmina en 1896 avec la création par le Baron Pierre de Coubertin des Jeux Olympiques modernes, dont la première édition eut eu lieu en Grèce. Les deuxièmes Jeux Olympiques allaient se tenir à Paris à l'occasion de la nouvelle Exposition Universelle, qui devait s'ouvrir en avril 1900. Et pour profiter de l'afflux de visiteurs que la capitale française espérait accueillir à cette occasion, un groupe d'entrepreneurs avait décidé de construire un nouvel Hippodrome place Clichy.

Numéros originaux et pantomimes traditionnelles

Thérèse Renz (c.1900)
Pour l'instant, la concurrence du Nouveau Cirque se limitait au Cirque d'Hiver, qui maintenait solidement le flambeau de la tradition équestre chère aux Franconi, et au Cirque Medrano, nouvellement ouvert, qui se révèlera rapidement un concurrent très sérieux (le Cirque des Champs-Élysées, lui, vivaient tant bien que mal ses dernières années). Avec ses somptueuses pantomimes aquatiques, ses numéros de qualité, son confort et son élégance, le Nouveau Cirque était encore un lieu de divertissement populaire. En avril, Hippolyte Houcke proposa La Chasse au Sanglier, qui, comme la chasse au cerf du Roi Dagobert, se terminait dans l'eau, et pour profiter pleinement du nouvel engouement pour la bicyclette, le Captain Wood et sa troupe jouaient au polo sur leurs vélos, ce qui dut divertir les membres du Jockey Club familiers de ce sport aristocratique.

En septembre 1898, La Chasse au Sanglier fut reprise(French) Short piece performed by clowns between acts during prop changes or equipment rigging. (See also: Carpet Clown) pour l'ouverture de la saison 1998-1899, qui fut exceptionnellement riche en numéros marquants. Les Meers Sisters, écuyères de panneau(French) A flat, padded saddle used by ballerinas on horseback. écossaises qui avaient été (et redeviendront) des vedettes du cirque Barnum & Bailey, firent l'une de leurs multiples apparitions au Nouveau Cirque (même s'il est difficile de savoir lesquelles des six talentueuses sœurs étaient dans ces programmes), mais la véritable star équestre de la saison fut incontestablement la superbe écuyère de haute-école(French) A display of equestrian dressage by a rider mounting a horse and leading it into classic moves and steps. (See also: High School) allemande Thérèse Renz. Toujours au rayon des arts équestres, Albert Schumann avait dressé un cheval à aller se coucher dans un lit, un exploit de dressage qui fit sensation (et sera répliqué au XXe siècle par son petit-neveu, Max Schumann). Quant à Valli de Laszewski, un écuyer polonais qui était un pilier du Nouveau Cirque, il guidait son cheval de haute-école(French) A display of equestrian dressage by a rider mounting a horse and leading it into classic moves and steps. (See also: High School) assis dans le sulky qu'il tirait.

La famille Lorch, l'un des meilleurs numéros de jeux icariens de l'époque, fut la grande attraction(Russian) A circus act that can occupy up to the entire second half of a circus performance. de la saison. Au rayon clownesque, Foottit & Chocolat restaient les vedettes incontestées du Nouveau Cirque ; ils avaient été rejoints par des clowns prometteurs, Luigi & Paolo Fratellini, tandis que leur frère François, éblouisait le public avec son remarquable numéro de jockeyClassic equestrian act in which the participants ride standing in various attitudes on a galoping horse, perform various jumps while on the horse, and from the ground to the horse, and perform classic horse-vaulting exercises. et ses sauts périlleux de cheval à cheval. Pour pimenter la saison, la séduisante Théo de Midya se dévêtit (dans les limites de la décence) sur son trapèze sous l'œil captivé des gentlemen du public qui ajustaient leurs monocles et retroussaient leurs moustaches.

Les éléphants de Maximilian dans La Cascade Merveilleuse (1898)
La nouveauté de la saison était une série de démonstrations de water-polo (le sport allait être inclu pour la première fois aux Jeux olympiques de 1900), mais bien-sûr, la piscine était également utilisée pour des pantomimes nautiques. La Cascade Merveilleuse (musique de Laurent Grillet) se déroulait à Java, où un prince de conte de fées organisait une « fête nautique » dans les jardins de son palais, commodément équipés d'un grand bassin alimenté par une cascade d'eau. Les points forts en étaient de séduisantes naïades, des chevaux plongeurs et, plus spectaculairement, les éléphants de Maximilian, qui plongeaient aussi dans la piscine ! La chorégraphie était signée Rosalie Pérès, dont les filles, Céline et Jeanne, présentaient leur pas-de-deux équestre dans le même programme ; Jeanne épousera bientôt François Fratellini.

La saison 1898-99 vit également une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). intitulée Dans la montagne, une reprise(French) Short piece performed by clowns between acts during prop changes or equipment rigging. (See also: Carpet Clown) de Pierrot Soldat avec Foottit, et À l'eau ! À l'eau !, une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). nautique dont le titre faisait référence au téléphone alors en plein essor (Allo ! Allo !). Pendant les vacances d'été, la salle fut repeinte et un système de ventilation fut installé en prévision de la saison estivale prévue par Hyppolite Houcke pour l'Expo. Le cirque rouvrit ses portes en septembre avec une reprise(French) Short piece performed by clowns between acts during prop changes or equipment rigging. (See also: Carpet Clown) de À l'eau ! À l'eau !. La vedette de ce programme était la belle écuyère de haute-école(French) A display of equestrian dressage by a rider mounting a horse and leading it into classic moves and steps. (See also: High School) Rita del Erido (Margaretha Liebmann), coqueluche de la haute-société qui bénéficia d'une importante couverture médiatique, même si elle n'était pas dans la même ligue que Thérèse Renz. (En 1906, Margaretha épousa le célèbre journaliste et romancier Henri Duvernois.)

Le siècle nouveau est arrivé !

Les Frediani (c.1900)
Quand janvier 1900 finalement arriva, le monde du spectacle se prépara pour l'ouverture de l'Expo le 14 avril, notamment les propriétaires du nouvel Hippodrome de la Place Clichy, qui comptaient l'ouvrir fin avril ou début mai, et contactèrent Hippolyte Houcke pour en prendre la direction. Sentant peut-être que l'entreprise était entre les mains d'un groupe d'investisseurs qui avaient de grandes ambitions et peu de connaissances en matière de show business, une mauvaise combinaison s'il en fut, il refusa poliment leur offre. (Ils ne réussirent pas à trouver à temps un candidat pour le poste, et Ernest Molier les sauva du désastre en se portant volontaire au dernier moment.)

L'année commença avec le départ de Laurent Grillet, qui avait été le directeur musical et le chef d'orchestre du Nouveau Cirque depuis le premier jour et avait composé la musique de pratiquement toutes ses pantomimes. Il fut remplacé par le chef d'orchestre et arrangeur Georges Wittmann, qui avait dirigé l'orchestre du défunt Hippodrome de l'Alma. Il est possible que l'indéracinable Grillet soit tombé malade : il mourut dans sa maison parisienne l'année suivante, le 5 novembre 1901, à cinquante ans ; violoncelliste et grand connaisseur d'instruments de musique anciens, il venait de publier une importante étude en deux volumes, Les ancêtres du violon et du violoncelle.

Quoiqu'il en fût, Hyppolite Houcke commença la nouvelle année avec encore une autre pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). nautique, Au fond de l'eau. Plus intéressante fut Les Indiens Sioux qu'il produisit pour accueillir les visiteurs de l'Expo, une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). inspirée de l'Ouest américain, dont la caractéristique principale était le plongeon dans la piscine d'un charriot tiré par deux chevaux. En termes d'équitation pure, on salua le retour de la grande écuyère Thérèse Renz. Quant aux indémodables Foottit & Chocolat, ils proposaient en entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. de circonstance intitulé Les Touristes, dans laquelle le piquenique qui concluait leurs mésaventures était gâché par une copieuse averse qui tombait de la coupole—pour la plus grande joie des vrais touristes qui étaient dans la salle.

Puis, pour éblouir les visiteurs de l'Expo, Houcke reprit La Chasse au Sanglier, avec ses chevaux et une meute de cinquante chiens se jetant ensemble dans la piscine en guise de final. Émile Blavet pensait aux touristes lorsqu'il notait dans le quotidien Le Figaro : « Il faut avoir vu le Nouveau Cirque pour dire que vous connaissez toutes les curiosités de Paris. » Puis juin vit les débuts à Paris du plus grand numéro équestre de l'époque, les Frediani, dont la sensationnelle colonne à trois sur un cheval, par Willy, Aristodemo (qui deviendra le grand augusteIn a classic European clown team, the comic, red-nosed character, as opposed to the elegant, whiteface Clown. Béby) et leur partenaire au sommet de la colonne, René Curet, fit beaucoup parler d'eux. Lorsqu'ils accomplirent cet exploit extraordinaire et dangereux à la fin de leur numéro d'acrobatie à cheval, Hippolyte Houcke insista pour que Curet soit protégé par une longe(French, Russian) Safety line connected to a performer by a belt, going through a pulley, and held on the other end by an assistant, or a teacher. Also know as a ''mécanique'' (see this word). de sécurité et que la première rangée de fauteuils autour de la piste soit évacuée.

Affiche pour La Chasse au Sanglier (1898)
Même si les Frediani attirèrent une foule d'amateurs de cirque et d'arts équestres au Nouveau Cirque, l'Expo ne fut pas une telle aubaine pour les cirques de la capitale ; si le Nouveau Cirque et Medrano firent de bonnes affaires (ce qu'ils faisaient de toutes façons), le Cirque d'Hiver n'améliora pas significativement une fréquentation déjà en baisse, et l'immense Hippodrome de la place Clichy eut du mal à remplir ses 5 000 places. Puis, les touristes quittèrent Paris après la fermeture de l'Expo le 12 novembre, et les Parisiens ne fournirent pas un public suffisamment nombreux pour rentabiliser l'Hippodrome : ses investisseurs durent le fermer à la fin de l'année. (Après une expérience ratée de cirque classique à piste unique, le bâtiment finit par abriter la ménagerie de Bostock et ses spectacles animaliers pendant quelques années, avant de finalement faire faillite en 1907.)

En fait, la société pour laquelle avaient été construits le Cirque des Champs-Élysées, le Cirque d'Hiver, les Hippodromes parisiens et le Nouveau Cirque—une société qui pratiquait les arts équestres, de la simple équitation aux subtilités raffinées de la haute-école(French) A display of equestrian dressage by a rider mounting a horse and leading it into classic moves and steps. (See also: High School)—disparaissait inexorablement. Parce qu'il s'adressa dès l'origine à un public plus diversifié, en grande partie local, et grâce à la proximité de la bohème montmartroise, le Cirque Fernando (et ensuite Medrano) avait évolué bien plus en symbiose avec les goûts changeants du public que ses concurrents plus conservateurs.

Le Nouveau Cirque servait les couches les plus aisées de la société parisienne, que sa situation privilégiée, son confort et son élégance architecturale séduisaient facilement. Pourtant, la génération de passionnés d'équitation pour laquelle il avait été construit s'étiolait lentement, tout comme la « haute société » parisienne, qui était en grande partie un dernier vestige du Second Empire—et la base originale du public du Nouveau Cirque, celle qui y achetait des loges à l'année, comme à l'Opéra. Sentant le vent tourner, Raoul Donval avait déjà commencé à développer des matinées familiales lors de sa tenure au Nouveau Cirque, portant une attention particulière aux enfants—des enfants élégants et bien élevés, bien sûr...

Grâce à sa piscine, le Nouveau Cirque pouvait présenter des productions spectaculaires que ses concurrents ne pouvaient égaler, et çà avait été jusque-là l'une des raisons de son succès ininterrompu. Mais la production de ces spectacles était coûteuse, et la relativement petite taille du Nouveau Cirque ne permettait pas de réaliser des profits substantiels. La France n'avait pratiquement pas connu d'inflation depuis le Second Empire (et même avant) et n'en connaîtra toujours pas avant la Première Guerre mondiale, et il n'était donc pas possible d'augmenter le prix des places sans risquer de perdre une partie du public. La situation était encore viable, mais elle avait peu de chance de s'améliorer ; ce sera le talon d'Achille du Nouveau Cirque.

Le crépuscule de l'âge d'or

Illustration de presse pour Le Pont Alexandre III (1901)
Comme son prédécesseur l'avait fait après l'Expo de 1889, Hippolyte Houcke commença l'année 1901 par une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). qui s'adressait à la nostalgie des Parisiens pour leur défunte Expo : Le Pont Alexandre III, « une grande revue merveillosodramaticodésopilante », comme l’appela le caricaturiste Blanchet-Magon dans le Journal de La Mode. Le pont Alexandre III, chef-d'œuvre de l'Art nouveau, avait été inauguré avec l'Expo, et reliait deux de ses bâtiments, le Grand et le Petit Palais, sur la rive droite de la Seine, à l'esplanade des Invalides, sur la rive gauche, où se tenait une partie de l'Expo (qui s'étendait du Champs de Mars au Palais du Trocadéro et, sur les bords de Seine entre le pont Alexandre III et celui du Trocadéro).

Comme d'habitude, Foottit et Chocolat étaient les vedettes de la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., dans laquelle ils apparaissaient, entre autres, en costumes orientaux, incarnant des Japonais ! Tout se terminait sur le pont qui enjambait le bassin d'eau, avec une joyeuse fête remplie de jolies filles, de feux d'artifice et de chutes dans l'eau. George Foottit, cependant, commençait à envisager un avenir loin du Nouveau Cirque ; il voulait travailler avec ses fils, Thomas, George et Harry, en espérant qu'ils perfectionneraient leurs compétences à ses côtés et qu'ils lui succéderaient éventuellement ; malheureusement, c'était un vœu pieux : aucun d'eux n'avait son talent. Bien que Foottit travailla avec Chocolat au Nouveau Cirque pendant huit ans encore, il saisit toutes les occasions qui lui permettaient de montrer ses talents ailleurs, avec ou sans son illustre partenaire.

Le Nouveau Cirque ayant joué sans interruption de septembre 1899 à fin juin 1901, Hippolyte Houcke profita des vacances d'été pour rafraîchir entièrement la salle et la machinerie. C'est dans ce qui semblait un Nouveau Cirque flambant neuf que Houcke présenta en octobre la première pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). de la saison, L'Estafette, une « pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). équestre et nautique à grand spectacle » sur un thème militaire, qui célébrait la conquête finale des territoires français d'Indochine en Asie du Sud-Est (qui englobaient ce que sont aujourd'hui le Vietnam, le Laos, le Cambodge et le territoire chinois de Kwang Chow Wan).

Si l'on en juge par la sobre affiche conçue par le très sérieux peintre militaire Maurice Mahut (1878-1929), L'Estafette n’avait probablement pas la légèreté à laquelle était habitué le public du Nouveau Cirque. Ce spectacle fut remplacé en décembre par une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). beaucoup plus festive, Le Petit Poucet, adaptée du conte de Charles Perrault, avec Chocolat incarnant l'improbable chef de protocole du désopilant monarque qu'incarnait Foottit, et le contorsionniste Juan Salmo, qui obtint un grand succès dans le rôle d'une grenouille. Pour cette pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., Basile Lemeunier (1852-1922) réalisa des décors peints sur des tulles qui descendaient de la coupole et entouraient la piste—un procédé inédit dans un cirque.

Barnum & Bailey in the Galerie des Machines (1901)
À cette époque, la célèbre écuyère de Bohème (alors dans l’Empire Austro-Hongrois) Ella Bradna se produisait au Nouveau Cirque : elle deviendra plus tard une star du cirque Barnum & Bailey, qui se trouvait justement à Paris. Le mastodonte américain, en tournée en Europe, s'était installé dans la gigantesque Salle des Fêtes de la Galerie des Machines, et avait ouvert ses portes le 30 novembre ; il resta dans la capitale jusqu'au 16 mars 1902. (Gigantesque vestige de l'Expo de 1889 qui avait également servi à celle de 1900, la Galerie des Machines était située sur le Champ de Mars en face de l'École Militaire.)

Même si le public parisien avait pu émettre des réserves quant aux trois pistes du cirque américain (et même, en l'occurrence, trois pistes et deux plateaux) et sur le fait que la taille de l'immense Salle des Fêtes faisait ressembler le spectacle à une exhibition de fourmis, il s'agissait néanmoins d'un événement majeur, et Barnum & Bailey était une attraction(Russian) A circus act that can occupy up to the entire second half of a circus performance. devenue incontournable qui attirait les Parisiens comme des mouches sur du miel—mais peut-être plus par curiosité qu'autre chose : la multiplicité des pistes mise à part, le format du spectacle avait été inspiré à l'origine par ceux des hippodromes parisiens, et n'était pas donc pas entièrement nouveau, et de nombreux numéros étaient déjà bien connus du public parisien.

Cependant, « Le Plus Grand Spectacle de la Terre » qu’annonçait Barnum & Bailey était réellement colossal, et les quatre éléphants d’Ephraim Thompson qui se produisaient alors au Nouveau Cirque faisaient pâle figure comparés à la vision d'un troupeau de quinze éléphants entrant sur le vaste hippodrome de la Galerie des Machines. Barnum & Bailey ne constituait peut-être pas un danger pour le Nouveau Cirque ou Medrano (les Parisiens allaient au cirque régulièrement, pas seulement une fois par an !), mais il offrait une autre image du cirque, dans laquelle une importante ménagerie d'animaux exotiques apportait un air de nouveauté, et dont l’exemple sera bientôt suivi par les grands cirques ambulants allemands.

Affiche pour "Le vrai Cake Walk" (1903)
La piste-piscine du Nouveau Cirque, par-contre, n'était déjà plus une nouveauté : même si elle permettait d’offrir des pantomimes nautiques à succès que l'on ne pouvait pas voir ailleurs, celles-ci étaient, avec le temps, devenues plus attendues que surprenantes. La véritable nouveauté viendra en octobre 1902 avec la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). Les Joyeux Nègres, inspirée des anciens Minstrel Shows américains, et dans laquelle Foottit et Chocolat contribuaient à dépeindre la « vie joyeuse » que les Noirs étaient censés avoir dans les plantations du sud des États-Unis. (Chocolat, lui, dut voir çà sous un autre angle !) Mais telles étaient bien-sûr les convictions de l'époque coloniale, et par conséquent, Les Joyeux Nègres n'était que fête joyeuse, pleine de gags, de rires, de chants et de danses.

Mais son extraordinaire succès vint d'une simple danse exécutée au cours de la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., le cake walk (littéralement, la Marche des Gâteaux). C'était une danse développée dans les Minstrel Shows américains à partir des prize marches (« marches de prix ») que l'on pouvait voir lors des réunions amicales d'esclaves dans les plantations. À la fin d'un concours de danse africaine à l'Exposition du Centenaire de 1876 à Philadelphie, un énorme gâteau fut remis au couple gagnant, qui quitta la scène en une sorte de marche stylisée et chorégraphiée au rythme de la musique—d'où le nom de cake walk qui allait remplacer la plus conventionnelle « marche des prix, » la sortie triomphale que faisaient traditionnellement les gagnants de ces concours. Le Cake Walk des Joyeux Nègres au Nouveau Cirque était interprété par le Duo Elk, spécialistes du genre, qui étaient en réalité blancs puisque les « minstrels » américains étaient des acteurs blancs maquillés (de façon assez caricaturale) pour incarner des Noirs. Les Elk étaient accompagnés par d'autres danseurs, dont les sœurs Pérès. Ce fut un succès sans précédent et le Cake Walk devint un nouvel engouement parisien.

Les Joyeux Nègres restèrent à l'affiche jusqu'à la fin de la saison, le 7 juin. Pendant tout ce temps, le Nouveau Cirque organisa plusieurs concours de Cake Walk amateurs, généralement suivis d'un bal, qui furent extrêmement populaires ; l'une de ces compétitions fut remportée par le jeune couple formé par François Fratellini et Jeanne Pérès. Les frères Lumière filmèrent le Duo Elk, qui fut ainsi immortalisé dans une version silencieuse de leur numéro, et Georges Méliès réalisa en 1903 le film Le Cake Walk Infernal. (Le meilleur exemple du Cake Walk tel qu'il fut interprété par les Minstrels américains peut être vu dans le film San Francisco que la MGM produisit en 1936). Malgré la vogue que cette pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). créa, Les Joyeux Nègres s'avéra être le dernier grand triomphe du Nouveau Cirque.

Le départ d'Hippolyte Houcke

Bien que Les Joyeux Nègres eut connu un succès indéniable, sa durée exceptionnelle était peut-être due en partie au fait que la production de plusieurs pantomimes en une seule saison mettait à rude épreuve les finances du Nouveau Cirque, et donc sa rentabilité. Le premier spectacle de la saison 1903-1904 que présenta Houcke fut une revue, Paris-Poursuite, qui ouvrit fin octobre et ne semble pas avoir laissé un fort impact. Elle fut suivie juste avant Noël par Modern Sport (intitulé ainsi, en anglais), une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). mise en musique par Georges Wittmann, qui tenta de reproduire le succès des Joyeux Nègres en introduisant deux nouvelles danses américaines, The Transatlantic et The Boston Ball.

Les Perezoff (c.1910)
Tout comme Les Joyeux Nègres la saison précédente, Modern Sport resta à l'affiche jusqu'à la fin de la saison, mais contrairement au Cake Walk, ses nouvelles danses ne décolèrent pas vraiment et les critiques furent mitigées. Dans cette pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., Foottit était le directeur d'un « gymnase américain », dans lequel Chocolat et les autres clowns, habillés en femmes, donnaient des exhibitions comiques de gymnastique, barres parallèles, anneaux romains, etc. Puis tout le monde se retrouvait dans un hôtel particulier (très richement décoré, nota la presse) où se déroulaient les danses, avant une « fête nautique » dans et autour du bassin, à laquelle participaient un couple de ballerines de l'Opéra de Paris. Cependant, si le public avait été heureux de revenir plusieurs fois voir les Elk danser le Cake Walk, il ne montra pas le même intérêt pour Modern Sport. Le Nouveau Cirque était en difficulté.

Si Modern Sport resta à l'affiche jusqu'en juin, les numéros de cirque (toujours d'une excellente qualité) changeaient à intervalles réguliers, et les incontournables Foottit et Chocolat amusait toujours le public avec le même succès, mais cela ne suffisait plus. Les actionnaires du Nouveau Cirque savaient bien qu'un tout nouveau cirque (le Cirque Métropole) était en construction(French) A temporary circus building, originally made of wood and canvas, and later, of steel elements supporting a canvas top and wooden wall. Also known as a "semi-construction." avenue de la Motte-Picquet, ce qui porterait à cinq le nombre de cirques permanents à Paris : la concurrence allait être rude et le Nouveau Cirque était à peine rentable.

Hippolyte Houcke débuta la saison 1904-1905 avec quelques bons numéros, dont l'écuyer letton Carlo Germain avec une cavalerie(French) The ensemble of the horses in an equestrian circus. de dix chevaux, un groupe de panthères présenté par un dresseur nommé Emmanuel et, pour faire plaisir aux gentlemen du Jockey Club, une écuyère qu'ils appréciaient, Rita del Erido. Fin octobre, Houcke monta une nouvelle pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., Hunting (un titre anglais, ce qui était une façon de célébrer l'Entente Cordiale qui venait d'être signée entre la France et le Royaume-Uni), qui revisitait un thème familier déjà utilisé dans Le Roi Dagobert et La Chasse au Sanglier, et dont l'action culmina avec l'écuyer Raoul Jouin plongeant avec son cheval d'une hauteur de neuf mètres dans la piscine. Il y avait l'excitement de la chasse, des paysannes accortes et leurs joyeuses farandoles, des chevaux, des chiens, un cerf, et la piscine ; ce qui manquait, c'était la nouveauté.

La revue annuelle traditionnelle, simplement intitulée La Revue, qui suivit en janvier ne laissa pas une impression durable, mais les Perezoff pimentèrent la sauce en février avec leur spectaculaire numéro de jonglage, Un souper animé chez Maxim's, dans lequel les sept jongleurs se passaient tout ce qu'ils avaient sous la main, des assiettes aux meubles de restaurant. Enfin, le 17 mars, Houcke reprit Les Joyeux Nègres et son Cake Walk, dansé par un couple d'enfants noirs, The Walkers. La pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). resta à l'affiche jusqu'à la fin de la saison, après quoi le contrat d'Hippolyte Houcke ne fut pas renouvelé. L’âge d’or du Nouveau Cirque avait touché à sa fin.

Mathias Beketov et son Grand Cirque Russe

Mathias Beketov (1908)
En fin de compte, les actionnaires décidèrent de louer le Nouveau Cirque au directeur russe Mathias Beketov (1867-1928), dont le « Grand Cirque Russe Beketow » était en tournée en Europe occidentale. ("Mathias Beketow" était l'orthographe allemande de son nom : son prénom était en fait le nom français Mathieu, orthographié Матвей en russe). Beketov était né en Russie dans le petit village d'Oriol, près de Nijni Novgorod, et commenca sa carrière comme palefrenier pour les frères Nikitine, qui possédaient un cirque stable à Nijni Novgorod.

De là, Beketov devint acrobate puis clown (à la manière des Dourov, avec des animaux dressés) et se produisit de nombreuses fois en Europe et, en 1893, aux États-Unis à l'Exposition universelle de Chicago. En 1894, Mathias Beketov créa sa propre compagnie de cirque avec laquelle il tourna dans la majeure partie de l'Europe du Nord-Ouest et de l'Est ; Premier directeur de cirque russe à s'établir hors de Russie, il devint célèbre pour ses somptueuses pantomimes. Il se révéla également un très bon écuyer et dressa même des éléphants ; sa fille, Vardya, et son fils, Alexandre, devinrent des écuyers très compétents sous sa tutelle. (Sa sœur, qui s'appelait aussi Vardya, épousa Oscar Schumann.)

Mathias Beketov s'était souvent produit en France, mais jamais dans la capitale. Avant de reprendre le Nouveau Cirque, il avait dirigé de 1902 à 1904 le Cirkusbygningen, le cirque stable de Copenhague, et, en avril 1904, sa compagnie s'était installée au Fővárosi Nagycirkusz de Budapest, que Beketov avait entièrement rénové à ses frais. Il avait donc d’excellentes références ! Le Nouveau Cirque rouvrit ses portes sous la direction de Beketov le 1er septembre 1905.

Pour la plus grande joie de son public parisien, Beketov, comme la plupart de ses collègues russes, péchait par excès de flamboyance. Ses programmes avaient du panache et incluaient certains des plus grands noms du monde du cirque, parmi lesquels le grand écuyer d'école Gustave Gaberel, les Rainat au trapèze volant , la troupe d'acrobates espagnols d'Alonso Bracco (qui réalisait un « pont humain » à cinq personnes), la femme-hercule belge Miss Athleta et les frères Houcke (les neveux d'Hippolyte Houcke, Lucien, Jean et Hippolyte) dans leur numéro de jockeys—avec Lucien qui présentait également son numéro de jongleur à cheval.

Au département des animaux, il y avait un groupe spectaculaire de neuf lions, cinq tigres, un ours et trois chiens de la ménagerie Hagenbeck présentés par Willy Peters, ainsi que les trois éléphants de la belle et aristocratique princesse Yvonne de Mareyna, qui n'était ni princesse ni aristocrate : elle appartenait à une vieille famille d'artistes forains sans particule à leur nom ! Et dans la grande tradition des directeurs de cirque européens, Mathias Beketov présentait lui-même un magnifique groupe de chevaux en liberté. Ses premiers programmes s’achevèrent sur un extravagant final russe, avec des femmes vêtues de somptueuses robes et coiffes, des cavaliers en fourrures et chapkas, et des images riches en couleurs du folklore russe.

Affiche pour Sibérie (1906)
Foottit et Chocolat étaient visiblement absents. Bien qu'il fut ressuscité à plusieurs reprises, leur duo avait officiellement cessé d'exister et ils quittèrent tous deux le Nouveau Cirque avec Hippolyte Houcke, qui les emmena en tournée dans les provinces françaises avec un éphémère Nouveau Grand Cirque de Paris—dont seul Foottit occupait le haut de l'affiche. Beketov avait engagé les clowns Tonitoff et Seiffert, Adolf Olschansky et Gobert Belling (le fils de Tom Belling, le créateur du personnage de l'augusteIn a classic European clown team, the comic, red-nosed character, as opposed to the elegant, whiteface Clown.), tous artistes renommés et de grand talent—et qui apportèrent probablement un peu d'air frais au département clownesque. Ils furent rejoints encours de saison par les clowns allemands Adolf & Victor Albano. (De son vrai nom Goebel, Adolf fut l'élève des célèbres clowns Enrico et Alfredo Albano, nés Goretti, qui prendront bientôt la place de Foottit et Chocolat comme clowns vedettes du Nouveau Cirque.)

En janvier 1906, Mathias Beketov mit en scène sa première pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., Sibérie, une « pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). nautique à grand spectacle », qui commençait sur des intrigues de cour au Palais d'Hiver de Saint-Pétersbourg, suivies du départ d'un groupe de prisonniers vers la Sibérie, qui étaient sauvés par leurs bienaimées russes. La revue théâtrale La Critique Théâtrale décrivit ainsi la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). : « Tout cela se passe au galop, parmi des chevaux fougueux s'élançant à fond de train au son du claquement des knouts et des revolvers dégainés. Cela se terminera par une chute générale dans un précipice et une poursuite dans un marais dégelé où les chevaux nageurs accomplissent des prouesses jusqu'alors insoupçonnées. » Entre les splendeurs de la cour russe, l'effervescence d'un numéro de cosaques, les tulles peints descendant de la coupole pour offrir de magnifiques décors, et le grand final dans la piscine, Sibérie ne manquait pas de moments spectaculaires !

À la mi-février, Sibérie fut remplacée par La Guerre Sino-Japonaise, une pièce militaire « exotique » qui illustrait le conflit de 1894-1895 entre le Japon et la Chine au sujet de la Corée. Le journal Le Ménestrel commenta ainsi ce spectacle : « Ils ne s'entretuent pas seulement dans cette nouvelle pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., ils dansent aussi beaucoup. On doit encourager la nouvelle direction, qui a fait un effet de mise en scène qui rappelle les belles soirées d'antan, » ce qui pourrait être vu comme un commentaire sur ce qu'avait offert le Nouveau Cirque précédemment. Sibérie et La Guerre Sino-Japonaise avaient en effet bien délivré leur lot d'émerveillement et d'émotion.

Alors que Sibérie débutait rue Saint-Honoré, le nouveau et gargantuesque Cirque Métropole avait ouvert ses portes sur l'avenue de la Motte-Picquet. C'était un concurrent de plus, et Beketov, comme ses prédécesseurs, n'était que trop conscient que le Nouveau Cirque n’était pas un endroit qui pouvait générer des profits importants, surtout pour quelqu’un qui avait un penchant pour l'extravagance. Le 22 avril 1906, après seulement huit mois à Paris et à la consternation de ses actionnaires, Mathias Beketov annonça qu'il quittait le Nouveau Cirque pour mieux s'occuper de son cirque de Budapest.

Bref interlude : Jean Houcke

Jean Houcke (c.1920)
Le conseil d'administration du Nouveau Cirque commença à envisager la conversion de son cirque en théâtre (ce qui n'était certainement pas une solution aisée) et ils approchèrent Vincent et Émile Isola, deux anciens illusionnistes dont l'empire théâtral comprenait l'Olympia de Joseph Oller et les Folies Bergère. Malgré le fait que leurs salles avaient une capacité d'accueil bien supérieure à celle du Nouveau Cirque, ce qui les rendait aisément rentables, les frères Isola ambitionnaient d'entrer dans l'univers plus respectable du théâtre « légitime » (ils avaient en tête le très officiel théâtre de l'Opéra-Comique), et ils déclinèrent l'offre poliment.

Finalement, après quelques tergiversations, les actionnaires décidèrent de confier la direction du Nouveau Cirque à Jean Houcke (1878-1973), qui s'était récemment produit sur sa piste avec ses frères Lucien et Hippolyte. Leur père, Eugène Léonard Houcke, était le frère d'Hippolyte Houcke et leur mère, Fanny, née Tourniaire, était issue d'une des plus anciennes et des plus illustres familles de cirque françaises. Bien que Jean Houcke n'eût que vingt-huit ans, sa vaste famille possédait ou gérait quelques-uns des meilleurs cirques stables d'Europe, et les problèmes liés à la gestion d'un cirque ne lui étaient pas étrangers. Et puis son seul nom suffisait à donner confiance au public du cirque parisien.

Jean Houcke était un écuyer talentueux, et un homme d'une grande élégance dans tous les sens du terme (et dont la remarquable élégance vestimentaire sera une des caractéristiques) ; il avait beaucoup de charme, un sourire permanent avec des yeux pétillants, et un excellent goût. Après son passage au Nouveau Cirque, qui sera son galop d'essai, il deviendra un brillant directeur de cirque, très respecté et doté d'un flair remarquable pour la programmation de ses spectacles. Rue Saint-Honoré, Jean Houcke s'occupa essentiellement du département artistique et fut épaulé sur le plan administratif par A.M. Rossi, qui avait tenu le même emploi avec Hippolyte Houcke, l'oncle de Jean.

Jean Houcke commença par ramener Chocolat au Nouveau Cirque (mais sans Foottit) et ouvrit la saison 1906-1907 le 9 septembre avec le sensationnel groupe de trente ours polaires de Willy Hagenbeck présentés par Albert Krüger. Ils participèrent à un spectacle intitulé Sur la Banquise, à la fin duquel ils glissaient dans l'eau sur un toboggan, une vision spectaculaire s'il en fut ! Dès la mi-décembre, une nouvelle pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., Les Skis norvégiens, mettait en vedettes de véritables skieurs norvégiens qui exécutaient des sauts à ski et participaient, tirés par des chevaux, à des courses en ski, un sport nordique populaire, bien que la taille de la piste en réduisit sans-doute l'effet ! Heureusement, le final avec les ours polaires de Hagenbeck glissant dans la piscine était particulièrement spectaculaire. Tout bien considéré, c'était assez original pour que la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). soit un succès.
Publicité pour Les Skis Norvégiens (1907)

Les numéros que Jean Houcke programma cette saison-là étaient également de grande qualité : les Pérezoff revinrent avec leur spectaculaire numéro de jonglage ; la célèbre troupe d'acrobates à cheval la Troupe Brun-Lécusson offrit une série originale de pyramides acrobatiques qui s'étendaient du phaéton aux chevaux qui le tiraient ; les Ombra tournoyèrent sur leurs barres fixes ; la famille Amato présenta des équilibres spectaculaire en colonnes sur leurs échelles libres ; et il y eut même un aéronaute équin nommé « Fille de l'Air » qui se tenait sur une plate-forme hissée jusqu'à la coupole du cirque sous une fausse montgolfière.

Aux côtés de Chocolat et d'une troupe d'augustes moins connus, le département clownesque accueillit le populaire Bob O'Connor dans sa nouvelle entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene., La Cochère parisienne, dont le final offrait le spectacle réjouissant du client (O'Connor) réduit à tirer une calèche dont le cheval s'asseyait tranquillement sur le siège du passager. Les clowns Moriss & Vincent (Manrico et Vincente Mariani) se joignirent également à la fête, ainsi qu'un jeune duo de clowns musicaux qui tentait encore de se faire un nom, Brick & Grock. (Grock était alors totalement inconnu et trouvera plus tard sa voie sous la tutelle d'un autre partenaire bien plus prestigieux, le grand clown Antonet.)

Quant à Chocolat, il reprit son rôle dans La Noce de Chocolat, proposée par Jean Houcke à la mi-février 1907. Ce n'était évidemment pas une nouveauté, mais Chocolat était resté populaire auprès du public du Nouveau Cirque, et sa présence dans cette infatigable « bouffonnerie nautique » n'avait rien perdu de son attrait. Peut-être a-t-elle été sortie du placard pour exploiter pleinement les talents de Chocolat, qui ne brillait pas beaucoup sans une structure solide comme celles que Foottit avait créées pour lui, ou peut-être parce qu'il aurait été trop coûteux à ce moment-là de créer une nouvelle pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances).. La Noce de Chocolat resta à l'affiche jusqu'au 5 mai, date à laquelle le Nouveau Cirque ferma ses portes pour la clôture d'été. La saison ne fut apparemment pas la réussite financière que tout le monde avait espérée, et Jean Houcke fit ses malles et partit pour des aventures plus enrichissantes.

Le Nouveau Cirque de Charles Debray

Alors que les Parisiens s'interrogeaient sur l'avenir du Nouveau Cirque, deux entrepreneurs, Messieurs Tison et Debray, surgirent de nulle part en septembre et en reprirent la direction juste à temps pour l'ouverture de la saison 1907-1908. Curieusement, et bien que Charles Debray (?-1927) fût resté à la tête du cirque parisien pendant près de vingt ans, l'histoire du cirque semble n'avoir gardé aucune trace d'eux avant leur arrivée dans la vie du Nouveau Cirque (et aussi dans celle du Cirque de Paris, anciennement Cirque Métropole) ; elle n’a même pas enregistré le prénom de Tison, qui décéda l'année suivante, en août 1908.

Le Cirque Métropole (1907)
Même si les premiers programmes de leur direction mentionnent « Direction : Tison-Debray », une petite affiche du « Nouveau Cirque de Paris » annonçant des numéros de fauves dans le Parc des Attractions de l'Exposition Coloniale de 1907 au Bois de Vincennes mentionne en sous-titre « Établissements Charles Debray, » ce qui semble indiquer que la compagnie de Debray avait pris possession en totalité ou en partie du cirque de la rue Saint-Honoré—et aussi que Tison n'était pas plus qu'un commanditaire.

Dans son livre La Merveilleuse Histoire du Cirque (1947), le grand historien de cirque Henri Thétard, qui avait connu le Nouveau Cirque de cette époque, ne consacre que quelques lignes à Debray, qu'il considère en quelque sorte comme un directeur insignifiant. Le fait que ni Tison ni Debray n'étaient des hommes de cirque et, de plus, qu'ils n'avaient aucune référence reconnue dans le monde du spectacle, peut expliquer le manque d'intérêt et l'indifférence que les historiens (et les journalistes) leur ont montré—sans compter que la direction du Nouveau Cirque et du Cirque de Paris de Debray n'a pas été une réussite du point de vue artistique. Debray était avant tout un homme d’affaires, pas un passionné de cirque, et ses priorités n’étaient pas d’ordre artistique.

Le Nouveau Cirque rouvrit néanmoins ses portes pour la nouvelle saison et le premier geste de Charles Debray fut de ramener George Foottit au bercail. Ainsi, le duo mythique Foottit et Chocolat put renaître, même si Foottit revint accompagné de ses fils, à qui il prodiguait bien plus d'attention qu'à son ancien partenaire. Puis, quelques semaines après l'ouverture du Nouveau Cirque, le 27 septembre 1907, Charles Debray prit également la direction du Cirque Métropole !

Affiche pour La Revue du Nouveau Cirque (1907
L'immense Cirque Métropole, qui avait enfin ouvert l'avenue de la Motte-Piquet, sur la rive gauche de Paris, affichait une capacité de 6.000 à 7.000 spectateurs, qui peut être réduite à 3.000 places assises, plus vraisemblables, si l'on ne compte pas les places debout dans le vaste promenoir, dont la capacité était certainement exagérée. Mais une capacité de 3.000 places n'en était pas moins impressionnante pour un cirque classique. Le Cirque Métropole connut des débuts difficiles : son ouverture, annoncée pour le 5 septembre 1905, avait été reportée à plusieurs reprises, et lorsqu'elle eut finalement lieu le 5 janvier 1906, une partie de la salle n'était pas encore terminée ! Dès le début, il devint évident que ce cirque était beaucoup trop grand et mal conçu : malgré toute sa splendeur, il était très froid et n'avait aucune atmosphère, tout le contraire du Nouveau Cirque. Pourtant, pour un directeur intéressé avant tout au profit comme l'était Debray, il semblait avoir un potentiel certain.

Au cours de la saison 1907-1908, Debray déplaça ses numéros d'un cirque à l'autre, certains d'entre eux « doublant » même dans les deux cirques, apparaissant dans la journée d'abord dans un cirque et un peu plus tard dans l'autre. C'était effectivement un bon moyen de faire des économies, à condition que les deux cirques ne partagent pas le même public. Debray également instaura un changement complet de programme toutes les deux semaines afin d'améliorer la rentabilité de ses cirques en raccourcissant le temps de retour de ses habitués. Cette stratégie impliquait cependant qu'une grande partie du public retournerait souvent au cirque, ce qui dépendait bien entendu de la qualité de l'offre.

Quelques bons numéros firent la navette entre les deux cirques, comme la troupe équestre Lécusson, les Monbar au trapèze volant et les clowns Enrico et Alfredo Albano, dont le succès commençait à faire de l'ombre à la gloire déclinante de Foottit et Chocolat. En février, le Cirque Métropole, lui, ferma ses portes, changea son nom en Cirque de Paris et… devint une salle de cinéma. Debray était dehors, mais il restait à la tête du Nouveau Cirque, qu'il dirigera jusqu'à sa fin, en 1926. (Le Cirque de Paris revint bientôt au cirque, et Debray y reprendra même brièvement ses fonctions directoriales en 1920).

En novembre 1907, Debray présenta sa première revue, intitulée sans beaicoup d'imagination La Revue du Nouveau Cirque, qui mit en vedette le comique Daniels et deux jolies starlettes des Folies Bergère, Blondinette d'Alaza et Nine de Pervenche, dont les carrières furent éphémères et qui tombèrent rapidement dans l'oubli, malgré leurs pseudonymes aristocratiques. Chocolat (jouant les rôles de "Madame Nègre" et "Le Roi de Siam") et Bob O'Connor assurèrent l'essentiel de la partie comique, et les 10 New-Brighton Girls dansèrent un ballet aquatique, partageant la piscine avec Monsieur Houghton, « champion de natation, » et Monsieur Vaissade qui exécuta un « plongeon dans les flammes. » Le programme comprenait également une nouvelle star équestre, la belle et talentueuse Thérèse de Ternann, qui montait en haute-école(French) A display of equestrian dressage by a rider mounting a horse and leading it into classic moves and steps. (See also: High School) à califourchon, comme le faisait Isabelle Chinon, et sera une abonnée du Nouveau Cirque jusqu'à l'avènement de la Première Guerre mondiale.

Le Nouveau Cirque à la dérive

Les Frères Albano
Comme ses prédécesseurs, Debray présenta des pantomimes : En 1908, Il pleut, il pleut ! offrait comme pièce de résistance une danse en sabots exécutée par de jolies « paysannes » en jupes minuscules. Elle mettait en vedette les frères Ovaro (Gabriel Mansuy et Raymond Frau), un duo de comiques de variétés, dont l'un, Raymond Frau, devint une star comique du cinéma muet sous le nom de Dandy. Les Ovaro, comme Blondinette d'Alaza et Nine de Pervenche, venaient du music-hall ; Debray tenta d'attirer un nouveau public au Nouveau Cirque en déclin en amenant sur sa piste des attractions qui se produisaient dans d'autres domaines, plus populaires que son cirque. Comme l’histoire du cirque l’a souvent démontré, cet expédient n’a jamais été un remède efficace—et si la plupart des critiques de théâtre n’y virent aucun problème, les véritables chroniqueurs de cirque commencèrent à hausser les sourcils.

En 1909, la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). fut remplacée par une opérette intitulée Le plus beau hussard de France, qui permettait au moins l'utilisation de chevaux, mais n'offrait pas la gaîté et la fantaisie d'une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances).. Foottit et Chocolat, cependant, eurent droit chacun à sa propre pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). : Foottit apparut dans Foottit Réserviste, une autre variation étirée de l'entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. du service militaire, dans laquelle Foottit, arrivé en retard à la caserne avec son domestique (Chocolat), fut pris pour le ministre de la Guerre ; puis Chocolat parut dans Chocolat aviateur, plus d'actualité et sans doute beaucoup plus originale puisque l'aviateur français Louis Blériot venait de traverser la Manche à bord de son avion, le premier aviateur à réussir ce qui était alors un exploit.

Pourtant, les étoiles de ces clowns légendaires s'éteignaient irrémédiablement. Ils quittèrent le Nouveau Cirque à la fin de la saison et s'installèrent au Cirque de Paris (rouvert sous une nouvelle direction), où Foottit fit se produisit avec ses fils, incapables de lui donner ce que Chocolat lui avait apporté, tandis que Chocolat faisait équipe avec son propre fils, Eugène Grimaldi, en clownGeneric term for all clowns and augustes. '''Specific:''' In Europe, the elegant, whiteface character who plays the role of the straight man to the Auguste in a clown team., mais qui ne pouvait égaler la présence et l'autorité de Foottit. Au Nouveau Cirque, les clowns vedettes étaient désormais les frères Albano (Enrico et Alfredo Goretti), un duo italien aux multiples talents qui excellait aussi bien dans le mime et l'acrobatie que dans la comédie verbale, et dont le style d'humour subtil s'adaptait parfaitement à l'atmosphère intimiste du Nouveau Cirque.

En 1910, Charles Debray présenta Coqueriquette, mise en scène par son régisseur(French) The stage (or ring) manager—and sometimes Ringmaster—in a French circus. (See also: Monsieur Loyal) de piste et chorégraphe, Louis Fouilloux. C'était une parodie du nouveau drame romantique couronné de succès d'Edmond Rostand, Chantecler, dont le grandiloquent texte en vers, déclamé par des acteurs habillés en animaux de basse-cour, se prêtait à une parodie facile et fournit aux Albano un bon matériel clownesque. Il s'agissait cependant plus d'un spectacle théâtral qu'un spectacle de cirque, mais il se peut qu'il ait attiré des spectateurs désireux de savourer la parodie d'une pièce qu'ils avaient vue ; pour Debray, tous les moyens étaient bons pour attirer un public, n'importe quel public, rue Saint-Honoré, à condition que les coûts de production fussent efficacement tenus en laisse.

Carte publicitaire pour Une Soirée à Blaga Park (1911
Les cinq productions proposées par Debray pour la saison 1910-1911 durent être réalisées à faible coût, car elles ne laissèrent pas un grand souvenir. La Chasse aux Cerfs était encore une autre version des vieilles « pantomimes de chasse. » En Vacances revisita les ébats au bord de l'eau de La Grenouillère. Dans les Landes montra le folklore particulier de la région des Landes, avec ses danses sur échasses, ses concours de lancer de béret et ses courses landaises—une version anodine des corridas dans laquelle les concurrents doivent esquiver agilement l'assaut de jeunes vaches énergiques et dotées de cornes impressionnantes, spécialement élevées pour ce sport; ce fut peut-être la pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). la plus originale du lot.

Quant à Ouest-État, train de plaisir, elle avait probablement quelque chose à voir avec l'intégration de la compagnie ferroviaire des Chemins de Fer de l'Ouest dans le réseau ferroviaire des Chemins de Fer d'État en 1909, et faisait probablement référence au fait que cette entreprise avait principalement transporté des vacanciers. Enfin, Une Soirée à Blaga Park, mettant en vedette deux comiques de variétés nommés Lecourt et Darius, faisait allusion au parc d'attractions Luna Park ouvert en 1909 Porte Maillot à Paris. Manquant d'originalité, de richesse et de la présence de vedettes connues du public, toutes ces productions furent vite oubliées.

Les numéros présentés cette saison comprenaient le célèbre numéro de jockeys des Frediani, les Rainats au trapèze volant , la Troupe Lécusson, tous ayant déjà été vus au Nouveau Cirque, l'évadé Stevens, Miss Dorcy avec un groupe de lionnes, et Mademoiselle Renée Furie présentant « Le Diabolo Humain, » une attraction(Russian) A circus act that can occupy up to the entire second half of a circus performance. sensationnelle qui suivait les traces de la célèbre Mauricia de Thiers, la première femme qui effectua un saut périlleux dans une automobile miniature en 1904 aux Folies Bergère, avant de créer un autre numéro de casse-cou(French) A front, or forward, somersault., « Le Bilboquet humain, » qu'elle avait récemment présenté au Casino de Paris; avec Miss Furie, Debray proposait un numéro de variétés dans le même esprit, mais moins cher. Il eut moins de chance en 1911 avec Mann-Ret, « La Toupie Humaine, » qui venait des fêtes foraines et pédalait pour faire tourner un gyroscope géant au sommet d'un poteau de dix mètres : le mât de Mann-Ret se brisa lors d'une représentation, l'envoyant vers la mort !

Les Frediani (1909)
Toujours des fêtes foraines vint Francesco Lentini, l'homme à trois jambes, un phénomène présenté dans le foyer ; Lentini rejoindra bientôt le Sideshow de Barnum & Bailey aux États-Unis. En 1912-1913, Debray proposa Blon-D'hin Caporal, une pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). qui était encore une autre version étirée de l'entrée(French) Clown piece with a dramatic structure, generally in the form of a short story or scene. du service militaire. Il mettait en vedette Blon-D'hin (Bruno Firemans, 1874-1951), un célèbre comique troupier franco-belge. Les chansons militaires humoristiques et les comiques troupiers étaient très populaires avant la Première Guerre mondiale, mais ils appartenaient à la scène des variétés et non au cirque. Blon-D'hin Caporal fut suivi d'une autre pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances)., La Grande Chasse à Courre, qui était encore une réadaptation d'un vieux classique.

L'année 1913 marqua au moins une étape importante dans l'histoire du Nouveau Cirque, même si elle n'est pas due à Charles Debray : le 14 juin à minuit, l' Association des Artistes Lyriques, une association caritative, donna son gala annuel sur la piste du Nouveau Cirque; des vedettes de la chanson comme le jeune Maurice Chevalier, la meneuse de revue Mistinguett et bien d'autres participèrent à des numéros de cirque assez simples qu'ils avaient préparés pour l'occasion, et la soirée (ou plus exactement la matinée) se termina par une joyeuse pantomimeA circus play, not necessarily mute, with a dramatic story-line (a regular feature in 18th and 19th century circus performances). écrite par le célèbre dramaturge et romancier Tristan Bernard (1866-1947), intitulée Tous à l'eau !. Ce gala fut le précurseur du légendaire Gala de l'Union qui naîtra dans le même cirque dix ans plus tard.

La Grande Guerre

Dès la saison 1913-1914, Debray limita les représentations de cirque à trois jours par semaine (le jeudi pour les matinées enfantines, le samedi et le dimanche). En semaine, les soirées étaient consacrées à la boxe, à la lutte, aux sports nautiques, à des concours de danse et même à un drame musical, Le Soupçon, et une opérette, Mademoiselle Caprice. Les spectacles de cirque furent aussi agrémentés de numéros de variétés : le Nouveau Cirque était désormais en plein déclin. Puis le 28 juin 1914, l'archiduc François Ferdinand d'Autriche fut assassiné par un nationaliste serbe à Sarajevo ; un mois plus tard, la Première Guerre mondiale commençait. Les cirques et les théâtres furent fermés jusqu'au début de 1915.

Enrico et Lola Pissiuti (c.1920)
La guerre fut très difficile pour les cirques : un grand nombre d'artistes masculins furent conscrits, les chevaux furent réquisitionnés par l'armée (ils étaient encore utilisés par les régiments à cheval et pour le transport du matériel), et les artistes venus d'Allemagne et de l'empire Austro-Hongrois, tous deux de grands réservoirs de talents, étaient bien entendu bannis. Malheureusement, ces défis ne constituaient pas une préoccupation majeure pour le Nouveau Cirque, dont les spectacles reposaient déjà en grande partie sur des artistes hors-cirque et dont le statut de « temple des arts équestres » n'était plus qu'un vieux souvenir, tout comme sa clientèle huppée. Tel était l'héritage de Charles Debray après sept années de direction !

Le Nouveau Cirque rouvrit ses portes en décembre 1914, plus tôt que la plupart des autres théâtres et cirques parisiens. Bien que, pendant la guerre, les chevaux furent absents de la plupart de ses spectacles, le grand acrobate à cheval Enrico Pissiuti et sa sœur Lola firent exception dans l'un des premiers programmes après la réouverture avec leur unique pas-de-deux sur un seul cheval. Puis, en janvier 1915, Debray présenta Consul (troisième du nom !), le célèbre chimpanzé dressé, qui, en queue de pie, cravate blanche et haut-de-forme, se comportait comme un gentleman ; il faisait depuis de nombreuses années sensation dans toute l'Europe dans les cirques et les music-halls, notamment aux Folies Bergère en 1909. Néanmoins, Debray donnait en général la vedette à des chanteurs et des numéros de music-hall dans ses programmes de cirque.

La saison 1915-1916 débuta avec une revue écrite par deux prolifiques écrivaillons de théâtre, André Mauprey (1881-1939) et Désiré Pougaud (1866-1928), intitulée Eh ! Alliés donc… au Nouveau Cirque !—un jeu de mots quelque peu boiteux ; hélas, le message prévu, « allez au Nouveau Cirque », ne fut pas très efficace. Alors que la guerre se poursuivait sans aucune fin en vue, les Parisiens cherchaient à échapper à la morosité ambiante ; le toujours populaire Cirque Medrano venait d'embaucher les Fratellini, un trio de clowns talentueux et original qui devint vite la coqueluche de Paris. Debray, toujours intéressé par les propositions lucratives, décida de lui emboîter le pas. Il trouva son clown vedette en la personne du très talentueux augusteIn a classic European clown team, the comic, red-nosed character, as opposed to the elegant, whiteface Clown. espagnol Antonio Lozano, qui venait de s'associer au clown Jean-Marie Cairoli, un pilier du Nouveau Cirque qui avait travaillé avec divers partenaires. Lozano avait fait une très belle carrière en France et en Scandinavie avec C.W. Ilès comme partenaire, mais ils s'étaient récemment séparés. Debray misa sur le talent et la réputation de Lozano et en fit la vedette d'entrées étirées qu'il faisait passer pour des pantomimes, comme Antonio Toréador et Antonio Détective, et donna même à Cairoli sa propre pièce, Le mariage de Cairoli—une vague réincarnation de La Noce de Chocolat. Pourtant, malgré tout leur talent, Cairoli et Antonio n'étaient ni Foottit et Chocolat, ni les Fratellini, et de plus, le Nouveau Cirque de Debray n'était pas propice à la formation de nouvelles étoiles du cirque. Debray réitéra en 1917 avec le clown Moriss (Manrico Mariani), qui parut dans Les Aventures de Moriss, mais il était bien plus à l'aise avec les comiques et chanteurs de variétés, et le Nouveau Cirque devint essentiellement un café-concert, avec quelques numéros de cirque intercalés dans le programme pour justifier son enseigne.

Les Années Folles

Otto Sailer-Jackson (c.1920)
La guerre prit fin le 11 novembre 1918. L’immédiat après-guerre fut une période faste pour les cirques. Charles Debray s'en rendit compte et le Nouveau Cirque commença enfin à présenter de vrais numéros de cirque avec un certain renom, notamment des numéros animaliers. Puis, au début de la saison 1920-1921, Debray reprit la direction de l'immense Cirque de Paris, qui avait eu son lot de problèmes financiers et traversa la guerre en salle de cinéma. Debray apporta avenue de la Motte-Picquet ses propres spectacles de variétés entrecoupés de quelques numéros de cirque. Ce n'était pas une bonne recette pour une salle trop vaste et sans intimité, et la nouvelle direction de Debray ne dura qu'une saison. (Il fut remplacé par Gaston Rousseau qui remit le Cirque de Paris sur ses rails.)

Pendant ce temps, les artistes de la coalition vaincue de la Triple Entente étaient à nouveau autorisés à se produire librement partout en Europe—bien qu'au début, ils trouvèrent plus sûr de se présenter sous des pseudonymes à consonance non-germanique. En Allemagne, le Mark s'était complètement effondré et Carl Krone, les Hagenbeck et d'autres directeurs de grands cirques dotés d'importantes ménageries avaient un besoin pressant de devises étrangères ; la solution fut d'envoyer certains de leurs numéros animaliers se produire à l'étranger. Ces attractions étant désormais plus abordables pour les autres cirques européens qu'avant la guerre, le Nouveau Cirque présenta au début des années 1920 une remarquable série de grands numéros d'animaux.

Tout commença en octobre 1920 avec Nora, l'hippopotame dressée du cirque Krone, qui devait plonger dans la piscine du Nouveau Cirque mais n'était pas toujours d'humeur à se baigner… Le groupe de sept ours polaires de Krone suivit en novembre et, en décembre et janvier, un groupe de lions présenté par le dompteur Croton—pseudonyme qui cachait un nom indéniablement germanique, Siegfried. En février 1921, Heinrich Wagner, utilisant Harry comme pseudonyme, dirigea le grand groupe de tigres du Bengale et de Sibérie du cirque Krone, l'un des numéros de fauves les plus spectaculaires de l'époque. La saison suivante, en septembre 1921, Otto Sailer, devenu Jackson, présenta un groupe de quatre tigres de la ménagerie du cirque Carl Hagenbeck (Sailer gardera son pseudonyme et deviendra célèbre sous le nom d'Otto Sailer-Jackson); en décembre, Alfred Bendix dirigea un groupe de quatre lions du même cirque.

Antonet et Béby (c.1930)
Bien entendu, les numéros de fauves ne constituaient qu'une partie de l'offre du Nouveau Cirque. Alors que les Fratellini attiraient toujours les foules au Cirque Medrano, le Nouveau Cirque accueillit les débuts parisiens d'un merveilleux duo de clowns en route vers la célébrité, Antonet et Béby. Antonet (Umberto Guillaume) était considéré comme le véritable héritier du légendaire Foottit, bien qu'il fut très différent d'apparence ; leurs personnages en piste étaient pareillement autoritaires, mais Antonet était bien plus élégant et raffiné. Il avait été le partenaire de l'un des augustes les plus créatifs d'Europe, Little Walter (Alexandre Ulrich), sous la tutelle duquel il avait appris son métier.

Béby, l'augusteIn a classic European clown team, the comic, red-nosed character, as opposed to the elegant, whiteface Clown. d'Antonet, n'était pas inconnu du Nouveau Cirque : il s'agissait d'Aristodemo Frediani, du légendaire numéro de jockeys des Frediani. Bien qu'il eût été, avec ses frères, une étoile équestre de première grandeur, il avait toujours voulu être clown et c'est ce qu'il fit dès qu'il quitta le numéro familial. Béby avait une forte présence en piste ; sa silhouette, carrée et solide, avec quelques touches surréalistes dans sa tenue vestimentaire, était naturellement comique et il pouvait être extrêmement drôle sans avoir à forcer ses effets. Son association avec Antonet était une adéquation parfaite (sur la piste du moins). Antonet et Béby donnèrent aux Parisiens une bonne raison d'aller au Nouveau Cirque : Debray avait enfin trouvé ses stars ! Mais ce n'était peut-être qu'un coup de chance car, peu inspiré, il continua à se montrer fidèle à lui-même dans ses programmations : ses têtes d'affiche étaient parfois des numéros venus des champs de foire, et il engageait même des numéros de fauves auprès de petites ménageries foraines.

Malheureusement, malgré les conditions favorables de l'après-guerre, Debray se montra incapable d'offrir quelque chose de vraiment original en plus de ses nouveaux clowns—mais Antonet et Béby ne pouvaient pas à eux seuls redorer le blason bien terni du Nouveau Cirque. Puis, en 1923, Gaston Deprez redonna vie au vénérable Cirque d'Hiver et lui rendit sa splendeur d'origine. Le Nouveau Cirque dut désormais composer avec deux cirques à succès, Medrano et le Cirque d'Hiver, ainsi qu'avec le Cirque de Paris, qui avait enfin réussi à se créer une clientèle sur la rive gauche. Debray avait apparemment raté l'opportunité qu'avait offerte la période de l'après-guerre, et son style de cirque et variétés à bon marché devint complètement obsolète en 1924, lorsque le l'Empire Music-Hall Cirque, dont le modèle était le célèbre WinterGarten de Berlin, ouvrit ses portes avenue de Wagram, près de la place de l'Étoile, avec un séduisant mélange de grandes attractions de music-hall et de cirque.

Rideau final

Le Nouveau Cirque redevint pour un soir le cirque élégant qu'il avait été jadis lorsque le Gala de l'Union des Artistes donna sa première édition dans sa piste le 3 mars 1923 à minuit. Créé par le grand acteur Max Dearly, il s'inspirait du gala de bienfaisance présenté sur la même piste dix ans plus tôt par l'Union des Artistes Lyriques, mais l'Union des Artistes, une différente association caritative, englobait des artistes de toutes disciplines, y compris le cinéma, maintenant en plein essor. Interprétant le rôle de Monsieur Loyal(French) The régisseur or presenter of the show in a French circus. So called because of the many members of the Loyal family who occupied this position brilliantly in Parisian circuses., Max Dearly présenta une brochette de stars transformées pour une nuit en artistes de cirque, dont l'incontournable Mistinguett ; Jane Marnac, présenta une haute-école(French) A display of equestrian dressage by a rider mounting a horse and leading it into classic moves and steps. (See also: High School), et Maud Loty un groupe d'oies dressées ; le célèbre comédien Michel Simon devint clown d'un soir ; et le dramaturge, comédien et roi incontesté du théâtre parisien, Sacha Guitry, fit un numéro de magie. Le Gala de l'Union (comme on l'appellera par la suite) devint un événement parisien glamour, organisé chaque année d'abord au Nouveau Cirque, puis au Cirque d'Hiver et dans quelques autres lieux, jusqu'en 1982. (Il fut relancé de 2010 à 2013, et une dernière fois en 2016, mais sa magie avait disparu.)

Le Nouveau Cirque, 251 rue Saint-Honoré (c.1900)
Malgré la présence en 1924 d'August Mölker avec un groupe de tigres et, l'année suivante, de Petersen avec douze lions de la ménagerie du cirque Strassburger, et malgré les efforts des populaires Antonet et Béby, trop de Parisiens s'étaient désintéressés du Nouveau Cirque pour le maintenir en vie. Non pas que le cirque fut tombé en disgrâce dans la capitale : Medrano, le Cirque d'Hiver et l'Empire se portaient bien, et même le Cirque de Paris avait désormais ses habitués. Mais même s'il n'était pas facile de rentabiliser le Nouveau Cirque, Charles Debray n'avait pas la vision artistique ni les talents créatifs de Raoul Donval, Hippolyte et Jean Houcke, ou de Mathias Beketov. S'il maintint artificiellement à flot le Nouveau Cirque pendant de longues années, il ne sut pas conserver ni renouveler son public, incapable qu'il était de lui offrir la qualité qu'il attendait de cette institution parisienne.

Le dimanche 18 avril 1926, le Nouveau Cirque donna sa dernière représentation dans l'indifférence générale. Charles Debray décéda l'année suivante. Le magnifique cirque de Joseph Oller fut démoli et remplacé par un immeuble de bureaux, qui fut ensuite transformé pour abriter aujourd'hui (2020) l'hôtel Mandarin Oriental. Ce n'est qu'après sa démolition que les Parisiens commencèrent à regretter leur vieux cirque, non pas pour ses spectacles récents, bien sûr, mais pour ce qu'il représentait : l'insouciance de la « Belle Époque, » quand Paris était la capitale la plus joyeuse, la plus élégante et la plus novatrice du monde ; le Nouveau Cirque avait incarné toutes ces qualités : les derniers vestiges de la Belle Époque disparurent avec lui.

Pour en savoir plus

  • Adrian, Histoire illustrée des cirques parisiens (Bourg-la-Reine, publié chez l'auteur, 1957)
  • Ferran Canyameres, Josep Oller et son époque (Barcelone, Editorial AEDOS, 1959)
  • Christian Dupavillon, Architectures du Cirque (Paris, Éditions du Moniteur, 2001) — ISBN 2-281-19136-2
  • Pascal Jacob, Paris en pistes – Histoire du cirque parisien (Rennes, Éditions Ouest-France, 2013 — ISBN 978-2-7373-6008-4
  • Dominique Denis, Nouveau Cirque – Paris de la Belle Époque (Aulnay-sous-Bois, Arts des 2 Mondes, 2019) — ISBN 978-2-915189-39-1

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